Foire aux questions

Caribou Forestier

Quelle est la différence entre les caribous, les cerfs et les orignaux ? N’y en a-t-il pas plein au Québec?

Bien que les caribous, les orignaux et les cerfs soient tous des cervidés, ils demeurent très différents. Ils se distinguent notamment par leur taille et la forme de leurs bois. Les caribous appartiennent à la même espèce que les rennes en Europe. Le caribou forestier fait partie de la sous-espèce des caribous des bois (Rangifer tarandus). Il s’agit de l’un des trois écotypes que l’on trouve au Québec, aux côtés du caribou montagnard et du caribou migrateur (toundrique). Contrairement aux populations de cerfs et d’orignaux, plusieurs populations de caribous présentes au Québec connaissent un grave déclin et sont vulnérables aux impacts des activités humaines.

Où vivent les caribous forestiers ?

Essentiellement dans la forêt boréale, entre le 49e et le 55e parallèle, notamment dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et sur la Côte-Nord. Ils sont répartis en douze populations. Deux de celles-ci se trouvent plus au sud, celles de Val-d’Or et celle de Charlevoix1. Malheureusement, en raison de leur important déclin, ces deux populations isolées sont maintenant en enclos.


MFFP, Caribou des bois, écotype forestier, Liste des espèces fauniques menacées ou vulnérables du Québec, mis à jour décembre 2021, site web, https://www3.mffp.gouv.qc.ca/faune/especes/menacees/fiche.asp?noEsp=53 

Combien en reste-t-il?

Selon les plus récentes données du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP)1, on estime le nombre de caribous forestiers entre 5000 à 10 000 individus sur une période allant de 2005 à 2016. La marge d’incertitude est donc importante. Cela dit, la majorité des populations de caribous forestiers connaissent depuis plusieurs années un déclin important, laissant dans une grande précarité les populations plus au sud (Val-d’Or ~7 individus ; Charlevoix ~ 16 individus ; Pipmuacan min. 177 individus).


MFFP (2021), Revue de littérature sur les facteurs impliqués dans le déclin des populations de caribous forestiers au Québec et de caribous montagnards de la Gaspésie, Ministère des Forêts, de la Faune et de Parcs, Québec, novembre 2021, en ligne, https://consultation.quebec.ca/uploads/decidim/attachment/file/122/RevueLitterature_CaribouVF.pdf 

Comment les scientifiques savent-ils le nombre de caribou restants?

Il est difficile d’évaluer l’abondance des caribous forestiers au Québec en raison de l’étendue du territoire qu’ils occupent, qui n’a jamais été inventorié en totalité. De plus, les inventaires sont réalisés du haut des airs, et le dense couvert de la forêt boréale diminue les probabilités d’observer les caribous. Toutefois, ce taux de détection combiné aux observations réelles permet d’estimer le nombre de caribous de chacune des populations et ainsi, leur abondance et leur fluctuation à l’échelle du Québec.

Les populations de caribou forestier suivent-elles des cycles naturels ?

La démographie (abondance et croissance) d’une population est étroitement reliée à son environnement. On appelle «facteurs limitants» les facteurs écologiques qui sont naturellement présents dans un écosystème et qui vont influencer la répartition et la démographie d’une espèce, sans toutefois compromettre la survie des populations. Pour le caribou, il s’agit notamment des maladies, des parasites, des feux de forêt et des épidémies d’insectes. Les «menaces» sont plutôt des facteurs qui affectent négativement la répartition et la démographie d’une population et qui peuvent mettre en péril leur survie. Bien qu’elles puissent être d’origine naturelle, les menaces sont souvent d’origine anthropique (humaine). Ainsi, les populations de caribous suivent en effet des «cycles naturels» comme d’autres espèces, mais ce sont les perturbations anthropiques qui font actuellement chuter les populations de caribous forestiers au Québec et mettent en péril leur survie. Les activités humaines qui détruisent l’habitat sont les principales menaces du caribou.

Quelles sont les menaces aux caribous forestiers ?

Les principales menaces sont :

  1. L’exploitation forestière, telle que la coupe des forêts matures qui lui servent d’abri et assurent son alimentation ;
  2. La prédation accrue par l’aménagement forestier, notamment par le loup gris, principal prédateur du caribou forestier ;
  3. Le développement du réseau routier (particulièrement des chemins forestiers), qui peut représenter un obstacle au déplacement du caribou et favoriser le déplacement des prédateurs ;
  4. La multiplication des sources de dérangement liées aux activités industrielles et au récréotourisme.

Est-ce que la chasse ou le braconnage sont à blâmer ?

La chasse sportive au caribou forestier est interdite au Québec depuis 2001. Bien que la chasse soit un facteur historique ayant contribué au déclin du caribou forestier, il ne s’agit pas actuellement d’une menace identifiée comme majeure pour le maintien des caribous.3 Il est important de rappeler par ailleurs que la chasse au caribou est d’une grande valeur culturelle et spirituelle pour plusieurs nations et communautés autochtones du Québec. Même si certaines d’entre elles ont cessé la récolte de caribous à des fins alimentaires, rituelles ou sociales, plusieurs souhaitent le maintien de la chasse ou un retour à celle-ci. S’il demeure que des actes de braconnages ponctuels sont commis dans des communautés autochtones comme non-autochtones, ceux-ci ne sont pas la norme et sont punis par la loi, contrairement à l’exploitation forestière intensive, menace principale pour le caribou, qui est non seulement légale, mais encouragée par les gouvernements. 


MFFP(2021), Revue de littérature sur les facteurs impliqués dans le déclin des populations de caribous forestiers au Québec et de caribous montagnards de la Gaspésie, Ministère des Forêts, de la Faune et de Parcs, Québec, novembre 2021, en ligne, https://consultation.quebec.ca/uploads/decidim/attachment/file/122/RevueLitterature_CaribouVF.pdf 

Pourquoi la coupe des forêts nuit-elle aux caribous forestiers ?

Les forêts résineuses matures sont importantes pour le caribou, qui y trouve abri et nourriture. En coupant ces forêts, on réduit ainsi la superficie d’habitat disponible pour le caribou, tout en rajeunissant les forêts, ce qui plaît beaucoup aux prédateurs. En effet, les jeunes forêts sont propices à l’orignal et au cerf de Virginie, qui sont des proies du loup gris. L’augmentation de l’abondance des proies favorise également l’abondance de loups, ce qui rend le caribou plus vulnérable à la prédation. De plus, les chemins forestiers construits pour réaliser les coupes forestières augmentent l’efficacité des prédateurs tout en fragmentant l’habitat du caribou, qui se retrouve alors de plus en plus isolé et vulnérable.

Est-ce que la protection du caribou forestier va tuer l’industrie forestière ?

Pas du tout! Il est tout à fait possible de concilier la protection du caribou et l’exploitation forestière durable. C’est plutôt la question inverse qui devrait être posée : qu’est-ce qui se passera pour l’industrie si nous ne nous dotons pas rapidement d’une stratégie de protection des caribous ? C’est la gestion à courte vue de nos forêts et le report continuel des actions qui, aujourd’hui, fragilise la forêt boréale, les espèces qui en dépendent et les emplois forestiers. Plusieurs organisations et experts réclament d’ailleurs une réforme de la foresterie actuelle, qui est considérée comme non durable. Une protection insuffisante du caribou pourrait mener à la perte de certifications forestières, essentielles pour développer de nouveaux marchés et répondre aux demandes des clients. Opposer les emplois forestiers à la protection du caribou est un faux débat, en plus d’être contre-productif.

Le caribou forestier est-il protégé ?

Oui, le caribou forestier est protégé en tant qu’espèce menacée à l’échelle du Canada par la Loi sur les espèces en péril (LEP) depuis mai 2003. Au Québec, c’est en 2005 que le caribou forestier a obtenu le statut d’espèce vulnérable en vertu de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables (LEMV).

Pourquoi, malgré cette protection, le caribou forestier décline ?

Malgré une mise en œuvre rapide du premier plan de rétablissement des caribous forestiers en 2008, le second plan de rétablissement (2013-2023), plus ambitieux et intégrant les plus récentes connaissances scientifiques, n’a toujours pas été mise en oeuvre par le gouvernement, obligeant ainsi le Québec à travailler à partir de méthodes que l’on sait inefficaces. Les massifs forestiers épargnés par l’industrie forestière sont trop étroits, les coupes et l’implantation de nouveaux chemins se poursuivant dans des secteurs névralgiques pour le caribou. C’est donc sans surprise que les caribous forestiers poursuivent leur déclin. De plus, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs bloque depuis plusieurs années des projets d’aires protégées qui seraient bénéfiques au caribou par crainte de perte de possibilités forestières

Pourquoi est-il important de sauver le caribou forestier ?

Il y a tellement de raisons! D’abord, le caribou est considéré comme une espèce «parapluie», ce qui signifie qu’en la protégeant, nous nous assurons de protéger plusieurs autres espèces qui partagent le même habitat. Le caribou est également une espèce de grande importance culturelle et spirituelle pour plusieurs nations et communautés autochtones. Enfin, en protégeant et restaurant l’habitat du caribou forestier, on s’assure de préserver une foule de services écologiques pour les générations futures, tels que la séquestration du carbone par les forêts et le récréotourisme, en plus de contribuer à la lutte et l’adaptation aux changements climatiques. En résumé, le caribou a non seulement une valeur intrinsèque, mais son habitat est également associé à de nombreux bénéfices économiques, sociaux et écologiques!

Que doit-on faire pour sauver les caribous forestiers ?

Il est reconnu que d’abaisser le taux de perturbation de l’habitat du caribou permet de favoriser l’autosuffisance1 d’une population. Un seuil de 35% de perturbations permettrait donc environ 60% de probabilités d’autosuffisance. Malheureusement, ce seuil est dépassé pour plus de la moitié des populations de caribous forestiers au Québec.2 Ainsi, protéger les derniers grands massifs forestiers, restaurer les chemins forestiers et diminuer les coupes dans les habitats essentiels figurent parmi les mesures prioritaires à mettre en place. Une bonne manière d’y arriver est la création d’aires protégées en collaboration avec la collectivité et les communautés autochtones.


1 “Une population est considérée comme autosuffisante lorsque sa tendance démographique indique une stabilité ou une croissance sur un court horizon de temps (≤ 20 ans), que l’abondance est suffisante pour permettre à la population de faire face à des évènements imprévus et qu’elle persiste d’elle-même sur un grand horizon de temps (≥ 50 ans) sans nécessiter des interventions de gestion active. “ (MFFP 2021)

2 MFFP(2021), Revue de littérature sur les facteurs impliqués dans le déclin des populations de caribous forestiers au Québec et de caribous montagnards de la Gaspésie, Ministère des Forêts, de la Faune et de Parcs, Québec, novembre 2021, en ligne, https://consultation.quebec.ca/uploads/decidim/attachment/file/122/RevueLitterature_CaribouVF.pdf 

Est-ce que la mise en enclos des caribous et le contrôle des prédateurs peuvent aider?

La mise en enclos est une mesure d’urgence déployée pour limiter le déclin fulgurant de certaines populations de caribous au cours des dernières années. Toutefois, cette mesure doit être temporaire et être menée en parallèle à la protection et à la restauration de l’habitat. Il en va de même du contrôle des prédateurs. Ces mesures ne sont pas des solutions à long terme et ne font au mieux que repousser l’échéance de l’extinction. Il faut s’attaquer à la source du problème, soit l’impact des activités humaines, notamment forestières, et trouver des solutions à long terme pour la cohabitation.

Est-il encore temps d’agir? Que puis-je faire ?

Il est encore temps d’agir, mais l’urgence est réelle! Bien que la protection du caribou relève des ministères fédéraux et provinciaux, les citoyen-ne-s peuvent avoir un impact sur la mise en place de mesures de protection faisant connaître leur appui à la protection des caribous et la mise en place d’aires protégées.

Voici quatre actions que vous pouvez poser :

1) Signer la déclaration d’appui à une stratégie efficace de protection du caribou forestier et de la Gaspésie.

2) Signer la pétition pour l’appui à la création d’une aire protégée dans l’habitat de la population de caribous du Pipmuacan , une initiative de la communauté autochtone de Pessamit.

3) Faire un don pour appuyer le travail de Nature Québec pour la conservation des caribous au Québec.

Vous souhaitez agir pour le caribou, mais ne savez pas par où commencer ? N’hésitez pas à nous contacter!