Femmes et environnement : 5 écologistes inspirantes

8 mars 2022

Pour souligner la Journée internationale des droits des femmes, l’équipe de Nature Québec vous présente cinq femmes leaders du mouvement écologiste mondial. Apprenez-en plus sur ces femmes inspirantes qui combattent des projets de développement nocifs, luttent contre les changements climatiques et militent pour plus d’égalité.

Vandana Shiva

Écoféministe et cheffe de file de l’altermondialisme

Écoféministe et cheffe de file de l’altermondialisme, Vandana Shiva est surtout connue pour sa lutte contre des géants agroalimentaires tels que Mosanto et son opposition aux projets menaçant les écosystèmes. Cette femme de science qui a vu le jour en 1952 dans le petit village de Dehradun en Inde a été la première fille de sa communauté à aller à l’école. Elle a débuté son activisme écoféministe aux côtés de sa mère en 1970 en s’impliquant dans le mouvement des Chipko, avec des dizaines de femmes de la région de l’Himalaya qui ont décidé de protéger les forêts en étreignant les arbres. Elle s’est aussi opposée à la construction d’énormes barrages sur la rivière Narmadâ et a fondé l’organisation Navdanya qui travaille à protéger la biodiversité, défendre les droits des agriculteur-trice-s et promouvoir l’agriculture durable. 

Pour Vandana, l’écologie et le féminisme sont indissociables. Elle a donc choisi de militer pour les droits des femmes et les droits de la nature, en célébrant la diversité culturelle et la diversité biologique. En 1993, elle a publié avec Maria Mies le livre Écoféminisme qui dénonce la domination du patriarcat sur la production du vivant. La même année, elle a reçu le Prix Nobel alternatif (Right Livelihood Award) « pour avoir placé les femmes et l’écologie au cœur du discours sur le développement moderne ».

«Le modèle de développement et de croissance économique, le contrôle des entreprises et la cupidité économique, ne sont pas seulement en train de détruire la nature, ils sont aussi en train de détruire notre humanité, c’est-à-dire notre capacité à faire preuve de solidarité, de compassion, et à prendre soin des autres. Mais aussi notre capacité à être entiers et vraiment humains, à vivre pleinement notre potentiel de bien-être et de bonheur. Nous sommes le sol, nous sommes la terre. Prendre soin de la planète, régénérer ses processus écologiques, est un devoir éthique et écologique. En prenant soin de la Terre, nous semons les graines de notre futur.» – Vandana Shiva

Vanessa Nakate

Militante dans la lutte contre les changements climatiques

La crise climatique affecte déjà depuis plusieurs années la vie de nombreux Ougandais et Ougandaises. En 2018, Vanessa Nakate, alors âgée de 24 ans, s’est engagée dans la lutte contre les changements climatiques parce qu’elle était de plus en plus préoccupée par les effets du réchauffement de la planète sur les communautés défavorisées. Suivant l’exemple de Greta Thunberg, elle a fondé le mouvement de grèves scolaires pour le climat dans son pays, l’Ouganda. Présente à la COP 25 à Madrid, au Forum économique mondial de Davos de 2020 et à la COP 26 à Glasgow, elle a dénoncé l’injustice que vivent les populations les plus vulnérables du monde qui subissent déjà de plein fouet les pires conséquences des changements climatiques alors qu’elles émettent le moins de gaz à effet de serre.

En revendiquant une meilleure représentation des pays africains dans la lutte contre la crise climatique, elle s’est donnée comme mission d’être la voix des populations les plus touchées par les changements climatiques, celles que l’on ne voit pas et que l’on n’entend pas. Les organisations qu’elle a fondées – Youth for Future Africa, Rise Up et le Green Schools Project – ont toutes pour mission de lutter contre la crise climatique, du micro au macro, comme en travaillant avec les écoles pour mobiliser la prochaine génération et pour installer des panneaux solaires et des éco-cuisinières. En 2020, elle a été nommée l’une des 100 femmes de l’année de la BBC et l’une des 100 jeunes Africaines les plus influentes. Vanessa est également l’une des jeunes leaders pour les Objectifs de développement durable des Nations Unies.

«Il y a une chose dont je n’entends presque jamais parler les dirigeants, et c’est les pertes et les dommages. Pour beaucoup d’entre nous, réduire et éviter ne suffit pas. Vous ne pouvez pas vous adapter aux cultures perdues, vous ne pouvez pas vous adapter aux traditions perdues, vous ne pouvez pas vous adapter à l’histoire perdue, vous ne pouvez pas vous adapter à la famine. Vous ne pouvez pas vous adapter à l’extinction.» – Vanessa Nakate

Kanahus Manuel

Activiste autochtone de la nation Secwepemc

Kanahus Manuel est une activiste autochtone de la nation Secwepemc qui milite depuis plusieurs années pour la protection des territoires ancestraux non cédés face à l’exploitation des ressources naturelles. Elle est la fondatrice et porte-parole du mouvement Tiny House Warriors, qui construit des mini-maisons autonomes le long du tracé du pipeline Trans Mountain pour bloquer sa construction sur le territoire Secwepemc non cédé. Les Tiny House Warriors défendent les droits et la souveraineté des Autochtones, la terre et ses ressources, ainsi que le droit des femmes autochtones d’être à l’abri de la violence masculine. Ce mouvement attire également l’attention de tous les Canadiens et Canadiennes sur le fait que le respect des droits humains fondamentaux des peuples autochtones est en jeu dans la lutte contre les pipelines.

Une des figures de proues du mouvement climatique autochtone au Canada, Kanahus s’est opposée à plusieurs projets de développement nocifs pour l’environnement, notamment des projets miniers. Elle sensibilise à la réalité des communautés autochtones, en particulier les femmes et les jeunes, qui ont été à l’avant-garde de la résistance environnementale. Elle dénonce aussi les conséquences environnementales et sociales de l’extraction des ressources naturelles, et particulièrement l’impact des camps masculins sur les femmes autochtones (voir encadré).

«Tout ce que nous sommes vient de la terre. Avec les communautés autochtones, cela revient toujours à la terre. Nous avons pu nous maintenir pendant des milliers d’années. Nous avons des noms de lieux dans notre langue qui sont aussi anciens que les montagnes qui nous entourent. Nous avons une relation étroite et une dépendance à notre terre, ininterrompue depuis la nuit des temps. À l’heure actuelle, l’une des plus grandes menaces pour nos terres et nos moyens de subsistance est l’industrie, comme elle l’a toujours été. L’extraction des ressources, sous forme de pipelines, l’exploitation forestière et minière, continuent de menacer notre peuple.» – Kanahus Manuel

Camps masculins

L’exploitation des ressources naturelles, et particulièrement des hydrocarbures, amène aussi souvent l’exploitation des femmes. En effet, les entreprises de pétrole, de gaz et de charbon installent, la plupart du temps dans des endroits reculés où la ressource est en abondance, de grandes opérations de forage. Les entreprises d’énergies fossiles y construisent alors des «camps masculins» pour les employés temporaires, qui sont en grande majorité des hommes. Ces travailleurs déracinés de leur communauté et apportés dans des endroits reculés amènent souvent avec eux une culture de violence. Ces flux intermittents de travailleurs représentent une forte perturbation pour les personnes qui résident dans ces zones, particulièrement pour les femmes. Un changement radical de la proportion des genres dans ces petites villes rurales transforme les dynamiques sociales pour le pire.

Ces camps masculins provoquent un accroissement de la criminalité et de la violence, comme cela a pu être observé dans l’industrie des sables bitumineux en Alberta, mais aussi dans les champs de pétrole au Dakota et au Montana. Ces camps masculins apportent de nombreux problèmes aux communautés près desquelles ils viennent s’installer, comme du trafic d’humains et une augmentation marquée des agressions sexuelles, de la prostitution, de la violence domestique et de l’usage de substances illicites. Ce sont les femmes racisées qui sont les plus touchées par ces camps masculins.

Naomi Klein

Journaliste primée, chroniqueuse et auteure à succès international

Crédit : Ministry of Truth

Née à Montréal au sein d’une famille militante, Naomi Klein est une journaliste primée, chroniqueuse et auteure à succès international des ouvrages : How To Change Everything : The Young Human’s Guide to Protecting the Earth and Each Other (2021), On Fire : The (Burning) Case for a Green New Deal (2019), No Is Not Enough: Resisting the New Shock Politics and Winning the World We Need (2017), This Changes Everything: Capitalism vs. The Climate (2014), The Shock Doctrine: The Rise of Disaster Capitalism ( 2007) et No Logo (2000). Ses livres, qui ont été traduits dans plus de 30 langues, ont contribué à sensibiliser et mobiliser la planète entière face à l’importance de combattre la crise climatique et le système économique actuel qui nous pousse au bord du gouffre.

Elle a été l’une des organisatrices et auteures du Leap Manifesto, un plan canadien pour une transition juste loin des énergies fossiles qui a été appuyé par plus de 200 organisations et des dizaines de milliers de personnes, et qui a inspiré des initiatives similaires en matière de justice climatique dans le monde entier. Elle a aussi co-fondé l’organisation The Leap, pour développer des idées audacieuses dans la lutte contre les crises croisées de notre temps : changements climatiques, racisme et inégalités. En 2015, elle a été invitée à prendre la parole au Vatican et a sensibilisé le pape François à la crise climatique.

Naomi est dorénavant professeure de justice climatique à l’Université de la Colombie-Britannique et la fondatrice du Centre for Climate Justice de cette université. Elle a été classée parmi les 100 meilleur-e-s intellectuel-le-s publics au monde dans le magazine Prospect, parmi les 100 personnes qui changent l’Amérique dans Rolling Stone et a été nommée l’une des femmes de l’année par Ms. Magazine.

«Notre système économique et notre système planétaire sont maintenant en guerre. Ou, plus précisément, notre économie est en guerre contre de nombreuses formes de vie sur terre, y compris la vie humaine. Ce dont le climat a besoin pour éviter l’effondrement, c’est une contraction de l’utilisation des ressources par l’humanité ; ce que notre modèle économique exige pour éviter l’effondrement, c’est une expansion sans entraves. Un seul de ces ensembles de règles peut être modifié, et ce ne sont pas les lois de la nature.» – Naomi Klein

Autumn Peltier

Militante du droit à l’eau et figure marquante du mouvement mondial des jeunes pour l’environnement

Née en 2004 sur le territoire non cédé de Wiikwemikoog, Autumn Peltier a grandi sur les rives du Lac Huron. Dès sa plus tendre enfance, sa mère et sa grand-tante lui ont inculqué l’importance de protéger l’eau. Protectrice du droit à l’eau des Anichinabés, elle est une militante du droit à l’eau mondialement reconnue et une figure marquante du mouvement mondial des jeunes pour l’environnement. En 2016, alors qu’elle était âgée de 12 ans, elle a interpellé directement le premier ministre Justin Trudeau dans une rencontre face à face pour critiquer la gestion de son gouvernement en matière de protection de l’eau potable dans les communautés autochtones, une rencontre qui lui a donné une visibilité médiatique internationale. En 2018, elle s’est adressée aux membres de l’Assemblée générale des Nations unies pour les sensibiliser à l’importance de protéger l’eau et dénoncer l’insalubrité de l’eau dans les communautés autochtones partout au Canada. Depuis 2019, elle est devenue la commissaire en chef des eaux de la nation anichinabée et elle s’est encore une fois rendue devant les Nations unies pour sensibiliser à l’importance de protéger l’eau. 

Elle a été nommée par la revue Maclean’s une des « 20 personnes à surveiller en 2020 ». Elle a aussi été nominée pour le prestigieux Prix international de la Paix des enfants en 2017, 2018 et 2019. En 2018, elle a été nommée sur la liste annuelle des 100 femmes les plus influentes de la BBC et en 2021, elle a reçu le RevolutionHer Community Vision Youth Award.

«Un jour, je serai une ancêtre, et je veux que mes arrière-petits-enfants sachent que je me serai battue pour qu’ils aient de l’eau potable.» – Autumn Peltier

Crédits

Rédaction : Viviane Rivard et Alice-Anne Simard

Montage : Catherine Bégin

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