Nature Québec en route vers la COP28
21 novembre 2023La vingt-huitième Conférence des Parties (COP) de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) aura lieu du 30 novembre au 12 décembre. Les discussions se dérouleront cette année à Dubaï, aux Émirats-Arabes-Unis. Vous avez certainement vu la nouvelle, ça fait beaucoup parler… Et Nature Québec y sera!
Anne-Céline Guyon, notre représentante lors de la COP28
Et voilà! Plus que quelques jours avant le grand départ vers la COP28… à Dubaï.
Une première participation à une COP climat pour Nature Québec.
Je vous entends déjà : “Aller à Dubaï, vraiment ???”, Quoi !??? Mais qu’est ce que vous allez faire là-bas ?” “Les COP, ça sert plus à rien!”, “Vous allez brûler du gaz pour lutter pour le climat, pffff!!!”
Et vous savez quoi ? Je vous comprends! J’ai eu les mêmes réactions que vous.
En toute transparence, je ne vais pas là-bas de gaîté de cœur.
Pourquoi participer à une COP aux Émirats-Arabes-Unis, un des principaux pays producteurs d’énergies fossiles au monde? Présidée par Sultan Ahmed al-Jaber, le PDG d’une entreprise pétrolière et gazière et dans un pays qui bafoue les droits humains qui plus est!?
Ces questions me taraudent autant que vous et je peux vous dire que c’est le cas de toute l’équipe de Nature Québec. Dans un tel contexte, le cynisme est légitime.
Mais une fois qu’on a dit ça, on fait quoi ? Car s’il y a une chose que je sais, c’est que le cynisme, c’est le pire ennemi de la mobilisation. Or, a-t-on le luxe de se démobiliser au moment même où les multiples crises environnementales et sociales s’amplifient et sont plus que jamais interreliées ? Se poser la question, c’est y répondre.
Il y a près d’un an, dans une entrevue entendue à la radio, à la question d’un journaliste qui demandait s’il fallait encore être optimiste au vu de la situation environnementale et de l’inaction gouvernementale, la personne interviewée répondait: «Ce n’est plus le temps de se poser la question d’être optimiste ou pessimiste, c’est le temps d’être activiste.» Cette posture m’habite depuis, et je m’y accroche, surtout dans mes moments de découragement.
C’est dans cet état d’esprit que je pars à la COP28. Avec la rage et la passion pour la cause.
La stratégie de la chaise vide…
pas une option !
Une chose est certaine, l’industrie des combustibles fossiles, elle, y sera à la COP28! Des discussions derrière les portes closes auront lieu, du lobbyisme intensif sera mené.
Dans ces circonstances, hors de question de leur laisser le champ libre. Ces arguments justifient plus que jamais la participation de la société civile et non le contraire. C’est pourquoi, en tant qu’organisme environnemental d’un pays du Nord, Nature Québec considère, avec tou-te-s ses allié-e-s, avoir le devoir de participer à faire contrepoids.
Ainsi, notre présence servira à témoigner et à pointer du doigt les négociations si elles se transforment en festival des fausses solutions. Nous ne fermerons pas les yeux non plus devant l’écoblanchiment de l’industrie pétrolière et gazière canadienne, qui sera d’ailleurs encore une fois présente dans la délégation officielle du gouvernement du Canada alors même qu’elle continue pourtant à augmenter ses émissions de GES année après année.
Encore sceptique quant au rôle de la société civile dans ce type d’événement?
Vous avez été nombreuses et nombreux à nous suivre pendant la COP15 sur la biodiversité, à Montréal, il y a un an. Vous avez été témoin de l’incroyable mobilisation de la société civile. Pour certain-e-s d’entre vous, vous en avez d’ailleurs fait partie, à l’intérieur comme à l’extérieur, avec comme résultat final, non seulement un accord en tant que tel – chose qui était loin d’être acquise au début de l’événement – mais un accord ambitieux. Un accord où plusieurs des revendications portées par les groupes de la société civile québécoise, canadienne et internationale ont été reprises, notamment en ce qui a trait à la reconnaissance et à l’inclusion des droits humains et des droits des peuples autochtones.
Remettre les COP à leur place
Dans un premier temps, entendons-nous bien, le rôle de ces grandes messes internationales annuelles sous l’égide des Nations-Unies n’est pas de convenir des actions locales à entreprendre. Il s’agit de s’entendre autour d’accords cadres à partir desquels le travail se poursuit «à la maison».
Plus exactement, les COP s’inscrivent dans un processus. Elles n’en sont ni le commencement, ni la fin. Différentes sessions de négociations ont lieu tout le long de l’année ; auxquelles s’ajoutent les rencontres du G7, du G20 et sommets comme celui sur l’ambition climatique des États qui s’est déroulé à New-York en septembre dernier. En fait, les COP permettent de clore des cycles de négociations sur différents enjeux en s’entendant sur des décisions qui sont inscrites dans le texte final, communément appelé le cover decisions. Chaque année, l’enjeu est donc de savoir quelles négociations on sera capable d’avancer et idéalement de clore.
Par exemple, l’année dernière, lors de la COP27, vous avez certainement entendu que les États avaient enfin convenu de la création d’un fonds pour le financement des pertes et dommages qui doit servir à aider les pays les plus vulnérables qui font déjà face aux catastrophes climatiques. Sachez que cette entente est le fruit de près de 30 ans d’âpres négociations entre les pays du Nord et les pays du Sud. Et si nous y sommes parvenus en 2022, c’est grâce à la ténacité des pays en développement qui ont fait front commun jusqu’au bout, soutenu par la société civile internationale.
30 ans ! Je vous vois rouler des yeux en lisant cela.
Certes, cela n’avance pas assez vite. Le rythme des négociations n’est pas à la hauteur de l’urgence. Mais comment espérer répondre au plus grand défi que l’humanité ait jamais eu à affronter sans un minimum de coordination internationale ? Surtout à l’heure où nos économies sont aussi imbriquées les unes aux autres. Rappelons-nous que sans COP, il n’y a pas d’accord ; et sans accord, il n’y a pas de promesses sur lesquelles talonner les dirigeant-e-s.
Concrètement, qu’allons nous y faire ?
Si Nature Québec a pris la décision de participer physiquement à la COP cette année, c’est avant tout pour y porter les enjeux de protection et de restauration de la biodiversité en lien avec les actions pour lutter contre les changements climatiques.
À l’heure où les débats s’enflamment sur les différentes technologies, il est crucial de rappeler que les solutions à la crise climatique ne devraient pas aggraver la crise de la biodiversité. Or, c’est le cas des réponses purement technologiques.
Nous mènerons donc notre travail à différents niveaux:
En suivant les négociations portant sur les enjeux biodiversité et nature
En déployant un plaidoyer politique auprès des délégations officielles canadienne et québécoise pour qu’elles se fassent porteuses de cette vision aux tables de négociations.
En organisant un événement sur les solutions nature pour le climat au pavillon de l’Union internationale de conservation de la nature, en collaboration avec nos ami-e-s de Global Youth Biodiversity Network
En participant à un événement visant à continuer la discussion autour des causes sous-jacentes aux deux crises environnementales, comme Nature Québec s’y est engagée en étant signataire de l’Appel de Montréal.
Nous continuerons également à pousser avec nos allié-e-s de la société civile canadienne et québécoise pour – entre autres – qu’enfin soit inscrit une sortie totale et sans compromis de toutes les énergies fossiles dans l’accord cadre final, pour que le mécanisme d’implantation du fonds sur les pertes et dommages soit à la hauteur des attentes des pays les plus vulnérables et pour le respect absolu des droits humains et des droits des peuples autochtones dans les politiques climatiques.
Pourquoi va-t-on à la COP28 ?
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Notre travail à la COP28 a notamment été rendu possible grâce au soutien financier du gouvernement du Québec dans le cadre du Plan pour une économie verte 2030. Ce financement provient de la mesure de Coopération climatique municipale (mesure 4.2.3.2b).
Rédaction
Anne-Céline Guyon, Analyste Énergie et climat, Nature Québec
Révision
Lucie Bédet, chargée des communications, Nature Québec