Foire aux questions

En mode solutions nature

Qu’est-ce qu’une solution nature?

Les solutions nature (nature-based solutions en anglais) sont un ensemble d’actions mettant de l’avant les écosystèmes afin de relever directement un défi de société (ex.: perte de biodiversité, sécurité alimentaire).

Dans le cas des changements climatiques, on parle de « solutions nature » pour le climat. Il s’agit alors d’actions visant à protéger, mieux gérer et restaurer les écosystèmes afin d’atténuer nos émissions de GES ou nous adapter aux conséquences des changements climatiques. Voir la définition officielle de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Comment ça marche?

Selon leur état et leur gestion, les écosystèmes agissent comme capteur ou émetteur de carbone. Par exemple, selon les conditions, les forêts peuvent être des “puits de carbone” lorsque les arbres emmagasinent ce dernier. Elles peuvent cependant être une source d’émissions lorsqu’elles sont brûlées. Protéger les forêts peut donc avoir un impact positif sur nos émissions.

De même, les écosystèmes peuvent nous aider à nous adapter aux conséquences des changements climatiques. C’est le cas lorsque la végétation qui se trouve en bordure des cours d’eau atténue l’érosion et les inondations. Renaturaliser les berges d’une rivière peut donc nous aider à nous adapter aux précipitations extrêmes et à la montée du niveau des eaux.

En somme, en conservant les écosystèmes, en prenant soin de ceux-ci et en les restaurant, on contribue à la lutte ET à l’adaptation aux changements climatiques. Il y a trois principes à retenir : protéger, restaurer et mieux gérer.

Pourquoi vouloir aider la nature?

En fait, il s’agit plutôt de l’inverse. La nature nous rend des services immenses. Il s’agit simplement de le reconnaître pour répondre aux défis de la société, notamment en ce qui concerne l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques. Cela dit, la nature ne saurait être réduite aux services qu’elle nous procure. Elle a également une valeur intrinsèque qui mérite d’être protégée.

Quelle est la différence entre les solutions nature, les solutions naturelles et les solutions fondées sur la nature?

L’expression “solutions fondées sur la nature” est la traduction de nature-based solutions, terme officialisé par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Les solutions naturelles ou solutions nature sont donc des synonymes.

À quel point les solutions nature sont-elles efficaces?

Une étude récente1 estime que les solutions nature, si elles sont correctement mises en place, pourraient fournir 37 % des efforts mondiaux d’atténuation de la crise climatique d’ici 2030, notamment par la protection et la restauration des écosystèmes, ainsi que de meilleures pratiques forestières, agricoles et de pâturage.


1Bronson et al., 2019

Quel est leur potentiel au Canada et au Québec?

Jusqu’à présent, peu d’études ont été menées sur le potentiel spécifique des solutions nature au Québec et au Canada. Cependant, notre territoire étant riche en écosystèmes, il y a fort à parier que ce potentiel est important.

Selon une étude2, au Canada, les solutions nature pourraient fournir jusqu’à 78,2 mégatonnes équivalent CO2 par an de réduction de GES d’ici 2030. Cela équivaut aux émissions d’environ 21 millions de véhicules sur les routes canadiennes chaque année. Caractériser le potentiel des solutions nature dans la lutte aux changements climatiques au Québec est un des objectifs de notre projet En mode solution nature.


2Drever et al. (2021)

Est-ce qu’il existe déjà des solutions nature au Québec?

Oui, mais elles ne sont pas nécessairement présentées comme telles. Partout au Québec, des groupes de citoyens, des municipalités, des MRC, des producteurs forestiers et agricoles mettent en place des initiatives porteuses pour l’environnement qui pourraient être qualifiées de solutions nature.

L’achat et la protection de boisés ainsi que la restauration de milieux humides à des fins de maintien des fonctions de puits de carbone en sont deux exemples concrets. La plantation d’arbres en milieu riverain afin de prévenir le risque d’inondation et d’augmenter la séquestration du carbone en est une autre.

Nous avons déjà des technologies. Pourquoi a-t-on besoin des solutions nature?

La réponse est simple : parce que les solutions les plus simples et les moins coûteuses sont dans la nature. Par ailleurs, la plupart des scientifiques s’entendent pour dire qu’au rythme actuel des bouleversements, aucune technologie humaine ne sera suffisante pour limiter les conséquences les plus graves de la crise climatique. Il faut donc utiliser tout ce que nous avons sous la main. Or, nous n’avons pas besoin d’inventer les solutions nature, elles existent déjà! 

Quels sont les avantages des solutions nature par rapport aux technologies?

Contrairement à la plupart des technologies humaines, les solutions nature génèrent d’importants co-bénéfices pour la santé humaine et la biodiversité. Par exemple, lorsqu’on protège ou qu’on restaure un écosystème, on préserve aussi l’habitat d’espèces végétales et animales. On s’attaque non seulement à la crise climatique, mais également à celle de la biodiversité.

Aussi, en protégeant des milieux naturels ou en créant de nouveaux parcs et en les rendant accessibles aux citoyen-nes, on encourage le contact avec la nature, l’activité physique et le bien-être psychologique.

Quels secteurs d’activité peuvent mettre en place les solutions nature?

À peu près tous les secteurs de la société peuvent mettre en place des solutions nature. Par contre, puisqu’elles concernent la protection, la gestion et la restauration de milieux naturels, les secteurs forestier et agricole, de même que le monde municipal sont parmi les mieux placés pour mettre en place ces solutions.

Les gouvernements du Canada et du Québec peuvent également agir en augmentant le nombre et la surface d’aires protégées ou encore en réglementant adéquatement les activités agricoles et forestières.

Quelles actions concrètes ces secteurs peuvent-ils mettre en oeuvre?

Ces actions varient beaucoup dépendamment du contexte et des enjeux auxquels on veut apporter des solutions.

Par exemple, une municipalité peut modifier son zonage afin de préserver des boisés, des milieux humides et des terres agricoles. Si elle fait face à un problème croissant d’inondation, elle peut renaturaliser les rives du cours d’eau problématique afin d’en solidifier les berges et laisser les végétaux agir comme digue naturelle.De même, l’industrie forestière peut améliorer ses pratiques d’aménagement, participer à la restauration et à la protection des écosystèmes forestiers. Quant au secteur agricole, il peut à la fois limiter ses GES et contribuer à l’adaptation aux changements climatiques en adoptant un certain nombre de pratiques comme l’augmentation des cultures de couverture, la meilleure gestion des nutriments et l’utilisation de bandes riveraines et de haies brise-vent.

Quel est le potentiel de réduction des GES par secteur?

Au Canada, on estime que les solutions nature appliquées dans le secteur agricole pourraient permettre des réductions de 37,4 mégatonnes d’équivalent CO2 par an d’ici 2030, notamment en optant pour davantage de cultures de couverture. Pour les milieux humides, éviter la conversion des tourbières et restaurer les marais salés pourraient éviter 15,5 mégatonnes d’équivalent CO2 par an d’ici 2030. Quant aux forêts, l’amélioration des pratiques forestières, particulièrement la conservation des forêts anciennes, et l’augmentation de la canopée équivaudrait à une atténuation de l’ordre de 11,9 mégatonnes d’équivalent CO2 par an d’ici 2030.

Dans quel secteur déployer les solutions nature est-il le plus efficace?

Cela dépend du problème que l’on veut régler. Au niveau de l’adaptation aux changements climatiques en milieu urbain, augmenter la canopée par la plantation d’arbres et renaturaliser les berges de rivières sont des solutions efficaces pour amoindrir l’impact des vagues de chaleur et des inondations.

En termes de réduction des GES, le secteur agricole est celui qui a le plus grand potentiel à court terme avec 37,4 mégatonnes d’équivalent CO2 par an, soit 48% du potentiel d’atténuation des solutions nature au Canada d’ici 2030.

Cependant, entre 2030 et 2050, c’est le secteur forestier qui emporte la palme. La raison : la restauration du couvert forestier (planter des arbres) a un immense potentiel de captation du carbone, car les arbres en absorbent durant leur croissance. Le hic ? Les arbres mettent du temps à pousser. Les bienfaits d’un arbre que l’on plante aujourd’hui prennent des dizaines d’années à se concrétiser. C’est pourquoi il est important de protéger les arbres et boisés existants.

Est-ce qu'il suffit de planter des arbres pour arrêter de polluer?

Absolument pas! Ce raccourci intellectuel est malheureusement bien présent dans le discours de grands pollueurs et il s’apparente à de l’écoblanchiment. D’une part, si les arbres absorbent bel et bien du carbone, ce bénéfice prendra plusieurs années avant d’être effectif. Par ailleurs, la hausse anticipée de la température laisse entrevoir une augmentation des feux de forêts, ce qui risque d’annuler rapidement l’effet de toutes les plantations d’arbres en relâchant des milliards de tonnes de carbone dans l’atmosphère. D’autre part, les solutions nature doivent être considérées comme un outil de plus dans notre arsenal pour lutter contre les changements climatiques. Elles peuvent aider à rencontrer nos cibles de réduction de GES, mais encore faut-il avoir en tête de réduire nos émissions.

En somme, planter un arbre ne sert à rien si on en coupe dix, et les solutions nature ne servent à rien si on continue de polluer. En suivant le Standard mondial de l’UICN pour les solutions fondées sur la nature, on minimise le risque de dérives et on peut reconnaître facilement les comportements d’écoblanchiment.

Est-ce que ça implique de retirer l’accès des communautés aux milieux naturels?

En fait, dans bien des cas, c’est plutôt le contraire. En protégeant et en restaurant les écosystèmes, nous nous assurons plutôt que ceux-ci restent accessibles pour les générations actuelles et futures. Il existe une pluralité d’approches de conservation permettant la fréquentation des milieux naturels. Les solutions nature peuvent aller de pair avec des aménagements tels que des sentiers de marche, des parcs urbains ou des pistes cyclables. 

À noter qu’en aucun cas, les solutions nature ne devraient déposséder ou exclure injustement des communautés. Elles impliquent des mécanismes de participation pleine et entière des acteurs concernés, particulièrement des communautés autochtones. La participation de celles-ci doit être fondée sur le respect du droit des peuples autochtones à un Consentement Préalable, Libre et Éclairé (CPLE).

Quels sont les critères d’une solution nature pour le climat?

Il y a 8 principes et 28 indicateurs pour bien définir les solutions nature. Voici les grandes lignes de ces principes en ce qui concerne les solutions nature pour le climat:

  • Elles doivent être fondées sur les services offerts par les écosystèmes indigènes et non sur l’artificialisation de ceux-ci;
  • Elles doivent contribuer à l’atténuation des émissions de GES ou à l’adaptation aux changements climatiques ou les deux;
  • Elles ne doivent pas servir de justification à plus de pollution;
  • Elles doivent offrir des co-bénéfices pour la biodiversité et le bien-être humain;
  • Leur mise en place doit prévoir des mécanismes qui assurent la participation de toutes les parties prenantes, en particulier les communautés autochtones dans une perspective de Consentement Préalable, Libre et Éclairé (CPLE).

Que puis-je faire pour mettre en place des solutions nature?

Les solutions nature se concrétisent à l’échelle des écosystèmes plutôt qu’à l’échelle individuelle. Leur mise en place doit tenir compte des interactions entre l’économie, la société et les écosystèmes. Cela implique d’importantes ressources. Créer un parc ou une aire protégée, renaturaliser les berges d’une rivière et améliorer les pratiques agricoles n’est pas à la portée d’un-e seul-e citoyen-ne.

Que faire alors? Convaincre les décideurs de les mettre en place. Parlez des solutions nature à votre entourage, à votre conseil municipal, à vos député-e-s. Faites-en une question de l’urne lors des élections. Appuyer des initiatives concrètes (ex: protéger des forêts et des milieux humides, renaturaliser des berges) est probablement la manière la plus efficace de s’assurer de la mise en œuvre de solutions nature.