Arrêtez de vouloir court-circuiter l’évaluation de Laurentia

13 novembre 2020

Depuis quelques jours, le gouvernement Legault et l’administration Labeaume travaillent de concert pour court-circuiter le processus d’évaluation environnementale de l’agrandissement industriel du Port de Québec.

Que le premier ministre, la vice-première ministre et le maire de Québec se positionnent en faveur de Laurentia alors même qu’il est encore sous évaluation auprès de l’Agence d’évaluation d’impact du Canada est une attaque en règle aux institutions démocratiques et aux citoyen-nes et organismes qui ont pris la peine de participer à la consultation. Rappelons que le mandat des élu-es est de représenter les citoyen-nes et non les intérêts du Port.

Modélisation-Laurentia

Essayer de forcer la main des gouvernements pour qu’ils annoncent des investissements publics de l’ordre de 180 millions $ dans le projet alors qu’il n’a pas encore été approuvé, c’est une demande de chèque en blanc pour un projet qui pose de grands risques pour les milieux naturels et les résident-es des quartiers centraux, et qui coûterait cher aux contribuables. On met encore la charrue devant les bœufs en demandant du financement public pour un projet qui n’a pas reçu d’approbation et qui est toujours en cours d’évaluation environnementale. Si le projet Laurentia était réellement rentable économiquement, le PDG de l’Administration portuaire n’aurait pas besoin de mettre de la pression sur les gouvernements provincial et fédéral pour obtenir à toute vitesse des centaines de millions de dollars en fonds publics.

«D’ailleurs, depuis le début, l’Administration portuaire n’a offert aucune étude économique sérieuse pour justifier son projet.»

N’oublions pas que l’Administration portuaire a modifié complètement son scénario d’utilisation du quai en plein processus d’évaluation environnementale, passant d’un projet de transbordement de vrac solide à un projet de transport de conteneurs. Même le nom du projet a dû être modifié en cours de route, Beauport 2020 devenant Laurentia alors que respecter l’échéancier de réalisation pour l’année 2020 devenait impossible. L’improvisation chronique de l’Administration portuaire dans ce dossier nous porte à croire que le Port souhaite uniquement agrandir pour agrandir, sans s’assurer d’abord que son quai flambant neuf ne sera pas vide faute de client. D’ailleurs, depuis le début, l’Administration portuaire n’a offert aucune étude économique sérieuse pour justifier son projet.

Il est important de rappeler que le projet Laurentia, s’il voit le jour, entraînerait des impacts importants sur les résident-es de Québec. Il entraînerait une augmentation du transport de marchandises par train et camion sur des artères déjà hautement achalandées et dans le voisinage immédiat de quartiers résidentiels, dont plusieurs centaines de passages de poids lourds chaque semaine dans Maizerets et Limoilou. Laurentia ne règlerait en rien les problèmes de pollution atmosphérique et de vétusté des installations actuelles qui posent une menace pour les citoyen-nes qui vivent près du Port. De plus, la Baie de Beauport et la façade maritime de Québec seraient défigurées à tout jamais.

Ce projet menace aussi l’environnement, puisqu’il détruirait l’équivalent de 72 terrains de football de milieux naturels et augmenterait le trafic maritime sur le Saint-Laurent. La construction de Laurentia aurait des impacts négatifs permanents sur de nombreuses espèces, notamment l’alose savoureuse, l’esturgeon jaune et le bar rayé, qui fut considéré un temps comme disparu et qui est toujours menacé. Le trafic maritime accru et le dragage de sédiments, dont certains fortement contaminés, auraient même des impacts sur le Saint-Laurent dans son ensemble en aval de Québec, menaçant le fonctionnement d’un écosystème d’une richesse exceptionnelle.

La stratégie actuelle de relations publiques de l’Administration portuaire vise à vampiriser près de 200 millions de fonds publics et à s’assurer que les élu-es se commettent avant que les failles sociales, environnementales et économiques de son projet ne soient révélées au grand jour. Nous invitons ceux-ci à ne pas tomber dans le panneau. En pleine relance économique, nous devons faire des choix pour nous assurer que l’argent public va au bon endroit. Pourquoi risquer un projet improvisé aux retombées hypothétiques, mais aux conséquences avérées, quand on peut financer un projet concret de modernisation, de nettoyage et de mise sous couvert de ses installations ?

Portrait d'Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature QuébecAlice-Anne Simard

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