CommuNature : lutter contre le déficit nature par l’inclusion sociale

25 avril 2024

Il est bien connu que nos routines quotidiennes sont constamment influencées par l’évolution des nouvelles technologies, lesquelles prennent de plus en plus de place dans nos vies. C’est cette déconnexion croissante avec la nature qui est aujourd’hui devenue une préoccupation majeure.

« Le programme CommuNature nous permet d’offrir des sorties de qualité à nos élèves. Sinon, avec le coût du transport, nous sommes très limités. » – Enseignant de l’école primaire Saint-Paul-Apôtre

Des initiatives telles que CommuNature émergent alors comme essentielles pour se rapprocher de l’environnement naturel qui nous entoure. En organisant diverses activités visant à favoriser l’accès à la nature pour tous et toutes, CommuNature s’attaque au déficit nature et encourage l’intégration sociale à travers une approche environnementale inclusive.

Dans cet article, nous examinons le rôle crucial de ce programme dans la lutte contre le déficit nature, en mettant en lumière ses activités, ses objectifs et son impact sur la communauté de la région de Québec.

Tout d’abord, c’est quoi le déficit nature ?

Lorsque vous lisez l’expression « déficit nature » que vous vient-il en tête ? Peut-être que vous en avez déjà entendu parler, ou encore probablement que ces mots ne vous évoquent rien de particulier.

Déficit nature

C’est de dire qu’en « une génération, la relation à la nature s’est profondément modifiée avec comme conclusion la réduction de l’espace de jeu durant l’enfance, désormais limité aux espaces intérieurs. » C’est la déconnexion croissante avec le monde naturel. [2]

En fait, le déficit nature serait associé à la déconnexion croissante avec le monde naturel, un terme popularisé par Richard Louv dans son livre Last Child in the Woods : Saving our children from Nature Deficit Disorder » ou en français Une enfance en liberté : protégeons nos enfants du syndrome de manque de nature

Imaginez une gamme de symptômes physiques, émotionnels et cognitifs qui surviennent lorsque les enfants et la société dans son ensemble s’éloignent de la nature, préférant les écrans et les espaces intérieurs. Au Québec, cette réalité se manifeste par un accès restreint aux espaces naturels, une augmentation considérable du temps passé à l’intérieur, et une diminution du jeu libre. En prime, nous assistons à une méconnaissance croissante de la nature, alimentant des peurs irrationnelles chez les enfants. Nous avons même un terme pour cela : le parent-curling ou encore l’hyperparentalité ! Avez-vous remarqué ces changements dans votre propre vie ou celle de vos proches ?

Quelles en sont les causes ?

Sentiment d’insécurité à l’extérieur

Intérêt pour les écrans de toutes sortes : ordinateur, télévision, tablette électronique, etc.

Hyperparentalité

Diminution du temps pour les activités libres

Aménagement des villes et architecture 

 Moyens de transport (dépendance à l’automobile pour se déplacer)

Milieux d’apprentissages à l’intérieur

Milieux de travail intérieurs

Par ailleurs, été comme l’hiver, il est primordial de passer du temps à l’extérieur. Or, nos emplois du temps se sont graduellement déplacés davantage à l’intérieur qu’à l’extérieur, ce qui a eu pour objectif de nous rendre de plus en plus sédentaires. Les écrans et la connexion numérique sont omniprésents alors que les parcs sont de moins en moins fréquentés. 

Pourtant, les impacts positifs des arbres, de la verdure et de la biodiversité sur la santé humaine sont bien documentés :  « Les études démontrent que non seulement les gens se sentent plus calmes et plus détendus lorsqu’ils sont dans la nature, mais le simple fait d’être à proximité d’un espace vert peut améliorer le sentiment de bien-être des employés de bureau dans les zones urbaines. »

Un peu partout, y compris au Québec, le déficit nature prend les allures d’une crise de santé publique et tous ne sont pas égaux devant le phénomène.

«On connaît bien les personnages de nos séries préférés, mais qu’en est-il des oiseaux de notre haie ? »

– Viviane Rivard, Chargée de projet en mobilisation

Pourquoi parler de démocratisation d’accès à la nature ?

On parle de démocratisation dans l’optique où on souhaite rendre accessible à tous et à toutes l’accès à la nature et ce, peu importe les classes sociales impliquées. 

La proximité de milieux naturels n’est pas une option offerte à tous-te-s de manière équitable. En effet, de nombreuses personnes, notamment dans les zones urbaines, peuvent avoir des difficultés à accéder à la nature en raison de contraintes financières ou de mobilité. Il est souvent difficile d’avoir accès à ces ressources naturelles sans une automobile et trop rares sont les trajets pouvant être effectués en transport collectif. Il existe toutefois des organisations telles que Navette nature proposant des offres de transport selon des dates planifiées à l’avance vers des parcs de la région de Québec ou de Montréal.

« Il existe fort probablement des enjeux de sous-représentation et d’accessibilité à la nature pour les groupes de minorités visibles au Québec. » – Roxanne Ruiz, conseillère-experte en diversité culturelle au sein de l’OBNL Option-Travail

 En outre, il est important de prendre en compte le fait que certains parcs ou espaces naturels ne possèdent pas toujours les infrastructures essentielles pour accueillir les individus nécessitant des mesures d’accessibilité. On parle par exemple  de guides pour les personnes malentendantes, de panneaux interprétatifs pour les personnes non voyantes ou d’installations accessibles aux personnes à mobilité réduite. 

D’un aspect financier, les activités de plein air peuvent aussi parfois être coûteuses, notamment en ce qui concerne l’équipement, les frais d’entrée dans les parcs et les frais de transport. Pour les personnes à faible revenu, ces coûts peuvent constituer un obstacle important à l’accès aux milieux naturels. 

Finalement, certaines communautés, en particulier les populations issues de minorités ethniques ou culturelles, peuvent rencontrer des barrières culturelles ou sociales qui limitent leur accès aux milieux naturels, comme des normes sociales ou des stéréotypes négatifs associés à certaines activités de plein air.

Donc, en plus d’optimiser un développement sain de la personne, de briser l’isolement social et de favoriser une meilleure santé générale, le fait de favoriser un meilleur accès aux milieux naturels aiderait en même temps à une sensibilisation environnementale croissante et donc à une meilleure protection de l’environnement. Plus les gens ont un accès facile à la nature, plus ils sont susceptibles de se préoccuper de sa préservation.

CommuNature

Pour s’attaquer à cette problématique, Nature Québec, en partenariat avec Nature Canada, mène le projet Communature depuis 2017. Ce projet a justement pour objectif de reconnecter des individus à la nature en leur en facilitant l’accès. Il propose des sorties éducatives destinées principalement aux jeunes et aux communautés en situation de déficit nature dans la région de Québec. Ces activités 4 saisons leur permettent aussi de les sensibiliser à l’importance de la conservation des milieux naturels.

Le programme CommuNature souhaite réduire les inégalités d’accès à la nature pour ceux qui en ont le plus besoin. Depuis 2017, des dizaines de sorties ont eu lieu sur le territoire de la région de Québec. À hiver 2024, de nouvelles activités de toutes sortes ont pu être effectuées avec différents publics.

Des activités de pêche sur glace a été proposée à des adultes en francisation dans le port de Québec au Village Nordik, plusieurs excursions au parc du Cap-Tourmente ont été réalisées avec des élèves de différentes écoles primaires de la Ville de Québec et finalement, des activités d’animation dans les parcs urbains de la ville ont été organisées auprès d’étudiants de francisation afin d’y observer la biodiversité urbaine.

« L’équipe de la réserve nationale de faune du Cap-Tourmente d’Environnement et Changement climatique Canada est fière, en collaboration avec l’équipe de Nature Québec, d’avoir contribué à rapprocher des élèves ayant un accès restreint à la nature. Cet hiver, nous avons vu des sourires et des joues rouges sur le visage des élèves, entendu des « Wow ! » et observé des élèves s’amuser avec les jeux d’hiver du réseau de mangeoires au relais de L’Érablière. C’est en apprenant à connaître la nature qu’on développe le goût de la protéger. Nous pouvons dire « mission accomplie », de nouveaux amants de la nature deviendront peut-être de futurs écocitoyens ! »

Chantal Lepire, agente de programme
Aires protégées, Service canadien de la faune

« Le programme CommuNature nous permet d’offrir des sorties de qualité à nos élèves. Sinon, avec le coût du transport, nous sommes très limités. » - Enseignant de l’école primaire Saint-Paul-Apôtre.

Enseignant Saint-Paul-d'Apôtre

« C’est la première fois que nous sortons avec la classe, ce qui est déjà un grand événement ! »

Enseignante en francisation

« La pêche sur glace a permis à certains élèves de renouer avec quelque chose qu’ils faisaient dans leur pays d’origine, c’était une expérience positive pour eux. »

Enseignante en francisation

« Je ne savais pas comment identifier les oiseaux et les arbres et avec les activités que nous avons faites aujourd’hui, j’ai même pu apprendre sur de nouveaux types d’arbres et d’animaux. »

Enfant de l’école primaire Sacré-Cœur.

« J’ai vraiment apprécié ma journée à Cap-Tourmente, car c’était bien de voir de nouvelles choses et de regarder la nature. »

Enfant de l’école primaire Saint-Paul-Apôtre.

« J’aime vraiment les mammifères, quand on en voit un, c’est très impressionnant. C’était intéressant de savoir que de nombreux mammifères peuvent être trouvés dans nos parcs. »

Enfant de l’école primaire Saint-Paul-Apôtre.

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