C’est quoi la biodiversité? Et pourquoi la protéger?
19 octobre 2022Alors qu’on entend de plus en plus parler de la crise climatique, une crise d’importance égale se déroule en parallèle et devrait attirer autant d’attention: celle de la biodiversité.
La biodiversité, c’est…
La biodiversité (ou diversité biologique) désigne d’une part l’ensemble des espèces et des écosystèmes présents autour de nous. Elle comprend aussi les différences au sein d’une même espèce, au niveau des caractères génétiques qui rendent chaque individu unique.
La diversité biologique se décline donc à différentes échelles, allant du contenu d’une cellule (p. ex. un gène) jusqu’à un ensemble de communautés d’êtres vivants et de leurs interactions avec le milieu (p. ex. un écosystème aquatique). En bref, la biodiversité constitue le tissu vivant de la planète. Et l’humain est indissociable de cet enchevêtrement, qui a pris des centaines de millions d’années à se façonner.
Quel est l’état de la biodiversité ici et ailleurs?
Selon un rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), jusqu’à 25 % des espèces végétales et animales sur Terre seraient menacées par une extinction à court terme en raison de l’activité humaine (1).
Cela correspond à environ 1 million d’espèces qui pourraient disparaître dans les prochaines décennies, dont environ 10 % des insectes, 41 % des amphibiens, 13 % des oiseaux, 27 % des mammifères, 33% des coraux constructeurs de récifs et 34% des conifères (2). C’est immense!
Ce n’est pas tout : le rythme d’extinction actuel est sans précédent, les espèces disparaissent de 100 à 1 000 fois plus rapidement qu’avant l’arrivée des humains (3). Si bien que pour plusieurs, nous sommes entrés dans une 6e extinction de masse du vivant, cette fois-ci causée par l’humain. Les causes sont multiples (déforestation, surpêche, changements climatiques, étalement urbain), mais en trame de fond, ce sont les modes de vie et les systèmes économiques qui sont en cause.
Ils entraînent malheureusement la destruction rapide du tissu vivant dont nous faisons partie.
Au Québec et au Canada, le portrait est tout aussi alarmant: ce sont plus de 650 espèces fauniques ou floristiques qui sont en situation précaire, et ce nombre est voué à augmenter (4)(5). Dans les dernières années, des espèces emblématiques comme le caribou, le béluga et la rainette faux-grillon ont poursuivi leur déclin, et ce, malgré leur protection légale.
Par ailleurs, le sud du Québec et du Canada concentre la plus grande diversité d’espèces, mais aussi la plus grande quantité d’espèces menacées et vulnérables. Les écosystèmes y sont particulièrement fragilisés par le développement urbain.
Il y a donc urgence de mettre en place des mesures plus ambitieuses pour freiner cette crise de la biodiversité et limiter ses conséquences, ici, comme ailleurs dans le monde.
Pourquoi est-ce important de la protéger?
L’érosion de la biodiversité a des répercussions sur chacun-e d’entre nous. C’est par le biais des services écosystémiques que le lien entre les humains et la biodiversité s’illustre le mieux.
En plus de la valeur intrinsèque de la nature, celle-ci rend de nombreux services à l’humain, et elle le fait gratuitement. Pensons notamment à la pollinisation des cultures par les abeilles, à la filtration de l’eau et de l’air par les plantes, à la formation des sols et à l’approvisionnement en ressources médicinales.
En détruisant la nature, on se prive de ces services essentiels.
Par exemple, la disparition des pollinisateurs met en péril la production alimentaire. Mondialement, plus de 75 % des cultures destinées à la subsistance des communautés locales dépendent de la pollinisation par les animaux (1).
La dégradation de sols, notamment l’érosion de la couche arable, affecte également la productivité et les services rendus d’une multitude d’écosystèmes, menaçant la sécurité alimentaire de millions de personnes dans le monde. On estime qu’environ un terrain de football est érodé toutes les cinq secondes dans le monde, alors que la production de quelques centimètres de terres cultivables nécessite environ 1 000 ans (6).
Par ailleurs, des écosystèmes en santé sont essentiels pour nous aider à nous prémunir contre l’érosion, les inondations, les vagues de chaleur et d’autres événements climatiques extrêmes. Selon l’Organisation des Nations Unies (ONU) et l’Organisation météorologique mondiale (OMM), les catastrophes naturelles liées au climat menacent de faire plus de 150 millions de victimes par an dans le monde et générer des coûts de 20 milliards annuellement d’ici 2030 (7). En détruisant la biodiversité, nous exacerbons donc notre vulnérabilité face aux changements climatiques.
Finalement, la destruction et la transformation des écosystèmes nous rendent également vulnérables à l’apparition de nouveaux virus. Avec plus d’un tiers de la surface terrestre mondiale et près de 75 % des ressources en eau douce qui sont destinées à l’agriculture ou à l’élevage (1), nous sommes plus que jamais exposés à de nouveaux pathogènes. La COVID-19 nous a aussi montré que la destruction des écosystèmes augmente notre vulnérabilité aux pandémies. Ainsi, 17 % des maladies infectieuses sont propagées par des animaux, dont le contact avec les humains est facilité par la destruction des milieux naturels (1).
La dégradation de la biodiversité engendre donc des conséquences désastreuses pour notre sécurité alimentaire, notre sécurité physique, notre subsistance et notre santé. À l’inverse, les gestes que nous posons pour la protéger génèrent des impacts positifs sur notre bien-être et renforcent notre résilience.
Pourquoi faut-il agir rapidement?
La crise de la biodiversité est intimement liée à la crise climatique; la biodiversité contribue à atténuer et à s’adapter aux changements climatiques, et les changements climatiques accentuent la dégradation de la biodiversité.
Ainsi, il y a un effet en cascade qui tend à accélérer ces crises auxquelles nous faisons face, ce qui rend la menace imminente pour nos sociétés.
Heureusement, les expert-e-s nous disent qu’il n’est pas trop tard pour agir (1). Mais il faut agir maintenant, en profondeur et à tous les niveaux, localement et mondialement. La biodiversité peut encore être protégée, restaurée et utilisée de manière durable grâce à des changements transformateurs.
La COP15 est une opportunité majeure afin de pousser les États signataires à être plus ambitieux dans la protection et la restauration de la biodiversité à l’échelle mondiale. C’est pourquoi Nature Québec a déjà assuré sa présence et travaille depuis plusieurs semaines à ce que le niveau d’ambition soit à la hauteur de l’enjeu. À suivre!
Capsule vidéo
Notre chargée de projet biodiversité et forêt Marianne Caouette vous explique qu’est-ce que la biodiversité et pourquoi il est urgent de la protéger.
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RÉFÉRENCES
(1) IPBES (2019), « Rapport de l’évaluation mondiale et des services écosystèmes », Résumé à l’attention des décideurs, 2019, https://ipbes.net/sites/default/files/2020-02/ipbes_global_assessment_report_summary_for_policymakers_fr.pdf
(2) UICN (2022), « La liste rouge mondiale des espèces menacées », 2022, https://www.iucnredlist.org/
(3) WWF (2018), « Living Planet Report », WWF report, 2018, document PDF, https://c402277.ssl.cf1.rackcdn.com/publications/1187/files/original/LPR2018_Full_Report_Spreads.pdf
(4) Gouvernement du Québec. Liste des espèces fauniques menacées ou vulnérables, en ligne, https://www.quebec.ca/agriculture-environnement-et-ressources-naturelles/faune/gestion-faune-habitats-fauniques/especes-fauniques-menacees-vulnerables/liste
(5) Gouvernement du Québec. Liste des espèces floristiques désignées menacées ou vulnérables ou susceptibles de l’être, en ligne, https://www.environnement.gouv.qc.ca/biodiversite/especes-designees-susceptibles/index.htm
(6) L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), « Sauver nos sols par tous les moyens possibles », 27 juillet 2022, https://www.fao.org/fao-stories/article/fr/c/1600066/#:~:text=Saviez%2Dvous%20qu%27une%20superficie,alimentation%20et%20%C3%A0%20l%27agriculture
(7) ONU (2020). «150 millions de victimes des catastrophes par an d’ici 2030, selon un rapport de l’ONU», 13 octobre 2020, en ligne, https://news.un.org/fr/story/2020/10/1079732
Marianne Caouette
Chargée de projet Biodiversité et Forêt
marianne.caouette@naturequebec.org
418 648-2104
Crédits
Révision : Gabriel Marquis