Communiqué de presse
Pour diffusion immédiate
Nature Québec dénonce les propos inquiétants du ministre des Forêts dans le dossier des aires protégées
Québec, le 5 mai 2021 – lors de l’étude des crédits de son ministère, le ministre de Forêts, de la Faune et des Parcs a tenu des propos inquiétants concernant les aires protégées qui démontrent sa méconnaissance profonde du dossier selon Nature Québec.
Alors que le ministre Dufour a reconnu que « dans les dix premières années après une coupe forestière, il n’y a jamais rien de beau là », il a tenté de diminuer l’impact qu’une coupe forestière peut avoir dans un projet d’aire protégée en affirmant que la forêt, « ça repousse » et a cité en exemple le secteur du Mont-Orford, où, selon lui, « on ne la voit plus la coupe, parce que 50 ans plus tard, la forêt a repris ses états ». Il a aussi réduit la mobilisation citoyenne en faveur de la création d’aires protégées à un simple phénomène de « pas dans ma cour », omettant de dire que les 83 projets d’aires protégées rejetés dans l’atteinte du 17% sont tous situés en terres publiques.
« À entendre le ministre Dufour, on devra attendre 50 ans avant de voir des aires protégées dans le sud du Québec, le temps que la forêt repousse suite aux coupes forestières qu’il veut autoriser pendant son mandat. Notre ministre des Forêts compte donc priver le Québec pendant des décennies d’aires protégées où nous pourrions nous ressourcer en nature près de chez nous, au bénéfice de notre santé mentale et physique. Dans le sud du Québec, la population devra se contenter d’aller se promener à travers les coupes à blanc et de regarder les arbres pousser », se désole Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec.
Le ministre des Forêts a aussi tenu des propos méprisants envers les citoyen-nes qui se battent depuis 10 ans pour protéger les écosystèmes de la rivière Péribonka au Lac-Saint-Jean.
« Le projet d’aire protégée de la rivière Péribonka est situé en terres publiques et a reçu l’appui de plusieurs milliers de citoyen-nes du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de toute l’industrie touristique régionale et de nombreux groupes environnementaux du Québec. Il fait partie d’un important projet écotouristique dans lequel la région a déjà investi plus de 3 millions $ en infrastructures touristiques et qui mobilise depuis trois ans des acteurs du développement régional, dont Tourisme Alma Lac-St-Jean et la MRC Lac-St-Jean-Est. En rabaissant le projet d’aire protégée de la rivière Péribonka à seulement “trois individus qui ne veulent pas une intervention en avant de chez eux”, le ministre Dufour montre qu’il ne connaît rien au projet et il fait preuve d’un grand mépris envers tous les acteurs régionaux du Saguenay-Lac-Saint-Jean qui demandent cette aire protégée depuis des années », dénonce Mme Simard.
Nature Québec rappelle que le projet d’aire protégée de la rivière Péribonka servirait à protéger l’habitat de trois espèces menacées selon la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables, soit le caribou forestier, le pygargue à tête blanche et le campagnol des rochers. On retrouve également dans le projet d’aire protégée une importante biodiversité, des forêts à haute valeur de conservation (FHVC), une forêt de bouleaux jaunes de 250 ans, vestige d’un ancien réchauffement climatique, ainsi que les peuplements de bouleaux jaunes et de pins blancs les plus nordiques du Québec. « Autoriser des coupes forestières dans le projet d’aire protégée de la rivière Péribonka nous ferait perdre à tout jamais des écosystèmes et une biodiversité remarquables. Des forêts de 250 ans, des peuplements exceptionnels et des espèces menacées, ça ne repousse pas en quelques années », déplore Mme Simard.
Selon l’article 52 de la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier, le ministre des Forêts est tenu d’exercer ses pouvoirs et responsabilités dans le respect de la Stratégie d’aménagement durable des forêts. Cette Stratégie est catégorique concernant le rôle du ministre dans la création d’aires protégées : celui-ci s’engage à “contribuer au développement et à la gestion durables d’un réseau d’aires protégées efficace et représentatif de la biodiversité”.
« En bloquant la création d’aires protégées dans le sud du Québec, le ministre des Forêts ne collabore pas à la création d’un réseau représentatif d’aires protégées, ce qui est en contradiction avec son obligation légale de le faire. Le ministre Dufour ne semble pas avoir compris qu’il est responsable d’un nouveau régime forestier dont l’un des critères légaux est la conservation de la biodiversité. Il doit faire amende honorable et reconsidérer sans plus attendre les 83 projets d’aires protégées non retenus dans un processus de désignation menant à la création d’un réseau représentatif d’aires protégées », explique Louis Bélanger, ingénieur forestier, professeur associé de la Faculté de Foresterie de l’Université Laval et co-responsable de la commission Forêt de Nature Québec.
Contrairement à ce qu’a avancé le ministre Dufour, Nature Québec rappelle que le statut d’aire protégée d’utilisation durable introduit dans le projet de loi 46 ne peut être appliqué à l’ensemble du sud du Québec et qu’il ne peut en aucun cas remplacer les 83 projets d’aires protégées rejetés lors de l’atteinte du 17%. « Le statut d’aire protégée d’utilisation durable doit servir à établir des zones tampons ou permettre une restauration écologique active. Ce statut pourrait, par exemple, être utilisé sur l’île d’Anticosti parce qu’une foresterie de restauration de la biodiversité permettrait de ramener des conditions d’intégrité écologique sur l’île et de protéger la zone périphérique du futur site du patrimoine mondial de l’UNESCO. En aucun cas cet outil ne doit être utilisé pour empêcher ou freiner la création d’aires protégées strictes représentatives des forêts naturelles du sud du Québec », conclut M. Bélanger.
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Renseignements :
Alice-Anne Simard, directrice générale
Nature Québec
418-803-4992
alice-anne.simard@naturequebec.org
À propos de Nature Québec
Nature Québec est un organisme national sans but lucratif œuvrant à la conservation des milieux naturels et à l’utilisation durable des ressources depuis 1981. Appuyée par un réseau de scientifiques, son équipe mène des projets et des campagnes autour de 4 axes : la biodiversité, la forêt, l’énergie et le climat, ainsi que l’environnement urbain. L’organisme regroupe plus de 90 000 membres et sympathisant-es, 40 groupes affiliés et est membre de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Partout au Québec, on sensibilise, mobilise et agit en vue d’une société plus juste, à faible empreinte écologique et climatique, solidaire du reste de la planète.
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