Défendons l’avenir de la forêt
27 février 2025Défendons l’avenir de la forêt
La forêt est menacée, nos communautés aussi. Mobilisons-nous !
La forêt fait partie intégrante de la culture, de la richesse et du quotidien des Québécois-es et des Peuples autochtones. Milieu de travail pour certain-e-s, espace de ressourcement pour d’autres, la forêt est aussi une ressource nourricière et un emblème des paysages du Québec. Elle est essentielle à la biodiversité et à la régulation du climat. Pourtant, la forêt québécoise va mal !
Feux dévastateurs, insectes ravageurs, pertes de vieilles forêts, déclin de la biodiversité, surexploitation et pressions commerciales… Les forêts et les communautés qui en dépendent font face à des menaces climatiques, environnementales et économiques inédites. C’est une tempête parfaite à laquelle s’ajoute le projet de loi 97 visant à «moderniser» le régime forestier qui risque d’aggraver les choses.

Le projet de loi 97 vient sacrifier les acquis environnementaux et sociaux hérités de la Commission Coulombe, au profit des intérêt à court terme des grands lobbys forestiers, incluant des multinationales, le tout de manière antidémocratique ! On recule de 40 ans en arrière, alors qu’il faudrait regarder 40 ans en avant !
Il faut nous mobiliser pour que le nouveau ministre des Forêts retire le projet de loi 97. Défendons l’avenir de la forêt (et le nôtre !)
Un cercle vicieux…
Les incendies de forêt record au Canada en 2023 auraient généré 2,98 milliards de tonnes métriques de CO2, soit l’équivalent des émissions de 647 millions de voitures en un an. Les feux et les pratiques forestières intensives transforment les forêts en source de carbone, plutôt qu’en puits, ce qui alimente les changements climatiques qui, à leur tour, augmentent les risques de feux à grande échelle.
Vous souhaitez en savoir plus ?
Quel est l’impact des tarifs de Trump sur l’industrie forestière québécoise ? Faut-il arrêter la foresterie ? Les mesures environnementales sont-elles responsables de la perte d’emploi en foresterie ? L’industrie forestière est-elle carboneutre ? On répond à ces questions dans notre FAQ.
Les forêts du Québec, menacées?
Les perturbations naturelles, comme les feux de forêt, les épidémies d’insectes ou les grands vents ont toujours existé. Elles sont normales et même essentielles au fonctionnement et à la régénération des forêts. Cependant, les interventions humaines et les pratiques forestières intensives sont venues déséquilibrer le cycle naturel de ces perturbations et la capacité de régénération des forêts affectant ainsi sa résilience face aux changements globaux. Aujourd’hui, elles mettent à mal les forêts en tant qu’habitats d’espèces, puits de carbone et ressources économiques viables.

Les coupes totales
Avec des feux plus fréquents, un trop grand recours aux coupes forestières intensives peut compromettre la régénération naturelle des forêts.

La perte des vieilles forêts
Tant les feux que les coupes commerciales mettent à mal les vieilles forêts qui prennent des centaines d’années à repousser et sont essentielles à la survie de plusieurs espèces, dont le caribou. La perte de ces écosystèmes accélère le déclin de la biodiversité.

La multiplication des chemins forestiers
En 2024, on compte près de 550 000 km de chemins forestiers au Québec. Les forêts morcelées par les coupes et les chemins forestiers peinent à demeurer un habitat viable pour les nombreux animaux et les plantes qui en dépendent pour survivre.

L’augmentation des forêts «secondaires»
Avec les coupes, on voit de plus en plus de «forêts secondaires», c’est-à-dire des forêts qui ont été coupées et aménagées. Or celles-ci sont moins résilientes que les vieilles forêts face aux changements climatiques, aux maladies et aux insectes ravageurs. Elles sont également moins performantes au niveau économique.

Le développement urbain et industriel
Dans le sud du Québec, l’étalement urbain cause une déforestation qui découpe petit à petit les terrains boisés et réduit leur connectivité. Plus au nord, une pression pour la déforestation est aussi exercée par le développement industriel, comme les projets miniers. Dans les deux cas, les forêts et leurs écosystèmes sont fragilisés.

Les changements climatiques
Les changements climatiques induits par l’activité humaine créent des conditions météorologiques extrêmes qui servent de carburant à des saisons de feux imprévisibles et destructrices. Ils ont aussi une incidence sur les cycles de reproduction de certains insectes ravageurs et contribuent à une migration des niches écologiques.
L’industrie scie la branche sur laquelle elle est assise
En ce moment, l’industrie forestière scie la branche sur laquelle elle est assise. Son modèle d’affaires est inadapté à l’état des forêts. Il aggrave la crise climatique et la perte de la biodiversité et il met en péril les emplois qui dépendent d’une forêt en bonne santé. L’exploitation intensive du bois résineux appauvrit les forêts et les communautés forestières, déjà affectées par les fluctuations du marché, les menaces tarifaires américaines, les feux et la dévitalisation.
Entre 1990 et 2010, environ 37 736 emplois ont été perdus en raison de l’évolution du marché. La diminution continue avec 1 861 emplois perdus en 2023 par rapport à l’année précédente.
L’industrie forestière veut faire croire que les mesures environnementales comme les aires protégées et la protection des caribous sont la cause principale des pertes d’emplois, mais ce n’est pas le cas. Une mauvaise gestion, la perte de valeur du bois récolté et des enjeux commerciaux sont davantage à blâmer.
Plutôt que de miser sur la résilience, l’adaptation et l’innovation, l’industrie forestière a investi massivement dans un lobbying intensif auprès du gouvernement afin de maximiser ses profits à court terme et affaiblir les acquis environnementaux.
Ce lobby a d’ailleurs poussé pour que le projet de loi 97 soit déposé et adoptée rapidement. Si l’industrie a d’abord applaudi cette réforme, plusieurs de ses acteurs se ravisent aujourd’hui face aux critiques grandissantes.
Rappelons aussi qu’une partie de l’industrie est désormais contrôlée par des intérêts étrangers, comme Domtar qui appartient à une riche et controversée famille indonésienne. Cela soulève des inquiétudes éthiques supplémentaires.
Les conséquences d’une forêt appauvrie
Les forêts, c’est plus que du bois à couper. Elles ont des fonctions multiples tant pour la biodiversité que pour les communautés. Et lorsqu’elles vont mal, les impacts pour l’économie, la faune et la sécurité des régions arrivent en cascade.
Les activités qui dégradent directement ou indirectement les forêts ont nécessairement un impact négatif sur la biodiversité forestière et les cycles fragiles dont elle dépend. Prenons l’exemple du caribou, qui a besoin de vieilles forêts en bonne santé pour survivre. Pour les caribous forestiers et montagnards, il existe un lien réel entre coupes forestières et disparition de l’espèce.
Mais ce n’est pas tout : ces forêts dégradées ont généralement un intérêt économique moindre pour la récolte de bois et le récréotourisme et sont moins résilientes face aux perturbations naturelles comme les feux de forêt.
Au Québec, la forêt s’appauvrit écologiquement ET économiquement. Malheureusement, l’actuel projet de loi 97 sur la réforme du régime forestier propose d’appauvrir encore plus les écosystèmes et les communautés.

Les pratiques forestières intensives sont la principale cause de déclin des caribous de la Gaspésie qui ont perdu plus de 80 % de leur population depuis une quinzaine d’années.
Agir pour défendre la forêt
En avril dernier, le gouvernement du Québec a déposé son projet de loi 97 visant principalement à moderniser le régime forestier. Depuis, les critiques fusent de toutes parts. Premières Nations, syndicats des travailleurs et travailleuses de la forêt, groupes environnementaux, acteurs et actrices du récréotourisme, fédérations des zecs, des pourvoiries, des chasseurs et pêcheurs ainsi que des activités de plein air, biologistes, scientifiques, ingénieurs forestiers, groupes citoyens, villégiateurs : tous sont grandement inquiets de cette réforme.
Nature Québec anticipe plusieurs reculs majeurs du projet de loi 97:
– Affaiblissement des acquis environnementaux de la Commission Coulombe, avec un aménagement écosystémique réduit et l’abolition des tables de gestion intégrée (TGIRT)
– Primauté donnée aux intérêts industriels sur une large part de la forêt publique
– Mépris des droits des Premières Nations, sans respect du principe de consentement libre, préalable et éclairé
– Perte de garanties pour la biodiversité et absence de vision durable pour les travailleurs, travailleuses et communautés
C’est pourquoi Nature Québec demande au ministre des Forêts de retirer le projet de loi 97 et lancer un véritable processus de concertation afin de bâtir une modernisation du régime forestier sur des bases solides et consensuelles, sans reculs environnementaux ni sociaux
SVP, joignez votre voix à la nôtre pour défendre l’avenir de la forêt québécoise !
Un « éveil boréal »

Nous n’avons pas à choisir entre la forêt, les caribous et les travailleur-euse-s. C’est un faux dilemme. Mieux protéger et gérer la forêt, c’est faire le choix d’une transition juste qui assurera la résilience des forêts ET des communautés. C’est pourquoi nous demandons au gouvernement de retirer le projet de loi 97, de mettre en place une réelle concertation en vue d’une VRAIE modernisation du régime forestier, adaptée aux défis et menaces d’aujourd’hui et demain.
Notre vision de cette modernisation inclut :
Ceci passe impérativement par le maintien de gains environnementaux hérités de la Commission Coulombe et du documentaire l’Erreur boréale comme l’aménagement écosystémique. Cela demande également de conserver une plus grande part de « vieilles forêts », au bénéfice de la nature et des communautés qui utilisent la forêt, et d’agir face au déclin de la biodiversité et des espèces comme le caribou.
La forêt, c’est à la fois un habitat pour la biodiversité et un puits de carbone, mais aussi un lieu pour le tourisme, les activités sportives, la chasse et la pêche, un lieu qui permet des usages traditionnels liés à un mode de vie fondé sur le lien au territoire. Dans son projet de loi visant à réformer le régime forestier, le gouvernement du Québec propose un zonage forestier basé sur la triade. Trois types de zones seraient créés : une d’aménagement forestier prioritaire (exclusive à l’industrie sauf quelques exceptions), une multiusages (statu quo qui concilie divers besoins) et une de conservation. Or, il nous apparaît disproportionné de consacrer au moins un tiers de la forêt publique exclusivement aux intérêts industriels où on interdit toutes mesures de conservation dans cette zone d’aménagement forestier prioritaire. Pire encore, la délimitation des zones s’opérerait avec une obligation de consultation minimale du ministère, sans garantie que les avis soient pris en compte dans les décisions finales. Un zonage du territoire forestier est un outil et non une finalité en soi. S’il doit y avoir zonage, celui-ci doit être multifonctionnel, planifié initialement à partir des zones de conservation, suivi des zones multi-usages, et seulement ensuite des zones de production, dans un véritable processus de consultation publique et participative, et ce, en ayant l’aval des Premières Nations.
Ceci passe impérativement par un système de gouvernance démocratique pour administrer les forêts. Selon Nature Québec, une véritable modernisation du régime forestier doit s’appuyer sur une véritable régionalisation des processus décisionnels, sans transférer une part de la planification forestière à l’industrie. Le rôle proposé pour les aménagistes forestiers régionaux dans le projet de loi 97 représente un pas vers une approche plus régionalisée, mais il reste limité : ces aménagistes relèvent toujours du Forestier en chef, basé à Québec. Il est impératif de maintenir et renforcer des instances démocratiques comme les tables de gestion intégrée des ressources et du territoire (TGIRT), qui permettent une gestion participative. Cette gouvernance régionale doit s’ancrer dans le respect des droits ancestraux des Peuples autochtones et du principe de consentement libre, préalable et éclairé. Au final, nous demandons que la responsabilité de la planification forestière demeure entre les mains des instances publiques et démocratiques, tout en assurant une gouvernance locale participative où les aménagistes forestiers régionaux sont encadrés par la politique d’aménagement durable et supervisés par un Inspecteur des forêts indépendant, afin de garantir la transparence, l’équité et la responsabilité dans la gestion des forêts publiques.
Faire face aux menaces environnementales, climatiques et économiques qui pèsent sur le secteur forestier est possible. Ceci passe impérativement par une diversification économique des régions et par la co-création avec les travailleurs et les travailleuses d’un plan de transformation industrielle et de transition juste. La foresterie reste et restera une avenue économique importante dans plusieurs régions du Québec. Toutefois, l’industrie contribue actuellement à un appauvrissement des forêts qui va ironiquement nuire à sa productivité et sa valeur économique future. Son modèle, basé sur l’exploitation intensive du bois résineux, menace l’avenir des travailleurs, des travailleuses et des communautés qui en dépendent. La réforme du régime forestier doit réduire la dépendance au bois résineux, mieux valoriser les essences sous-exploitées, développer la deuxième et la troisième transformation ici, au Québec, et renforcer l’économie circulaire pour réutiliser les déchets de construction au lieu de les enfouir.
On a tout à gagner d’une forêt résiliente. C’est une forêt qui brûle moins vite et moins souvent, qui est bénéfique à notre santé, qui abrite des espèces comme le caribou et qui permet de multiples activités comme une foresterie durable et le récréotourisme.
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