3 opportunités pour des ruelles vertes, les bienfaits révélés en temps de pandémie

5 novembre 2020
Ruelle de Limoilou, photographie de Pascal Germain

Crédit photo : Pascal Germain

Dans mes souvenirs d’enfance, la ruelle était mon espace de jeu. L’endroit où on se lançait la balle et où j’ai appris à faire du vélo à deux roues! Ça, c’était au début des années 90 à Montréal. Depuis, ces tiers lieux ont toujours gardé leur magie nourrie par ma mémoire de gamine de 5 ans. Il y a quelques années, je me suis retrouvée à Québec et j’y ai découvert le réseau des ruelles de Limoilou! Toujours aussi fascinée par ces corridors mystérieux, ponctués de clins d’œil sympathiques à la vie quotidienne, je m’y suis invitée, emportée par l’appel d’un passage chaleureux, par l’exploration d’un décor rempli de surprises et surtout par des retrouvailles avec cet univers familier. Puis, par un heureux hasard de circonstances, j’ai eu la chance, à mon tour, d’apporter de l’amour et du temps à ces interstices de villes qui ont bercé mon enfance. Voilà maintenant 2 ans que ma vie professionnelle au sein de Nature Québec s’applique à l’accompagnement de citoyens de Québec dans le verdissement de leur ruelle avec ma collègue Elisabeth.

En cette période trouble, nous avons eu envie de rendre hommage aux ruelles vertes de Québec à travers leurs aménagements et le témoignage des riverains, sans lesquels elles n’existeraient pas. Ces histoires rappellent le potentiel qu’offrent les ruelles vertes, leurs impacts sur la résilience des collectivités et le baume qu’elles ont mis dans un quotidien où régnait un virus historique. Ce potentiel se reflète dans les différentes opportunités offertes par les ruelles, que ce soit pour verdir et embellir son quotidien, pour y aménager un petit espace potager, pour y faire jouer les enfants en toute sécurité, ou encore pour y tisser des liens, pour s’y sentir chez soi, pour s’y sentir chez nous!

La ruelle comme potager

La volonté de ramener l’agriculture en ville est souvent à la base des projets de ruelles vertes. Dès les premières discussions lorsque nous entamons un projet, les riverains parlent de pouvoir récolter des tomates entre voisins, de couvrir les clôtures de grimpantes et de houblons, qui pourquoi pas, pourraient servir à une bonne brassée de bière maison. On y rêve aussi de grands arbres et d’arbustes fruitiers pour embellir l’arrière-cour, pour avoir plus d’ombre ou encore pour faire des compotes le dimanche après-midi. Ainsi, en alliant les talents de menuisiers et de jardiniers de leurs riverains, les ruelles ont vu germer une multitude de végétaux comestibles, que ce soit en étagères, en smart pots ou en potagers collectifs.

C’est le cas de la ruelle La mare aux canards aménagée cet été, où une parcelle du terrain de madame Jolicoeur a été mise en commun pour la plantation de comestibles, de vivaces et même d’un lilas.

«Quand mon mari vivait, on avait de petites plantations, mais je ne pouvais plus rien y faire depuis. Avec les nouveaux aménagements, les enfants ont vu comment ça se cultivait, comment poussaient les tomates. Il y a bien des enfants qui ne connaissaient pas ça.

Moi, je n’ai pas laissé périr ça, j’ai ramassé les feuilles de laitue et les tomates. Ça parait pas gros, mais ça produit beaucoup. Ça faisait longtemps que ça n’avait pas été cultivé, la terre était riche. Et là on mange des cerises de terre ! »

– Madame Jolicoeur, ruelle La mare aux canards

Crédit photo : Gracieuseté La mare aux canards

Ce petit lopin de terre au centre de la ruelle a également été une opportunité pour les citoyens de se côtoyer en toute sécurité et de se détacher un peu de l’anxiété liée à la COVID-19. Au moment où plusieurs étaient en télétravail ou tout simplement en arrêt, les ruelles vertes ont offert un passe-temps aux jardiniers en herbe, ainsi qu’un accès sécuritaire à des aliments frais.

Les enfants aussi ont pu profiter des bienfaits de leur ruelle verte en s’initiant au jardinage et en découvrant d’où proviennent les fruits et légumes qui sont habituellement sur les étagères d’une épicerie. D’ailleurs, on ne s’étonnera pas que les petits fruits ne restent jamais bien longtemps accrochés à leur socle et que les enfants reviennent les joues étrangement bleutées ou bien rosées!

La ruelle comme terrain de jeu

Crédit photo : Imane Benhacine Photographie

Les ruelles, ce sont aussi des espaces de jeu, d’échanges et de création en devenir. Ce sont des endroits pour courir, jouer et rigoler entre enfants ou adultes. On peut y retrouver croque-livres, boîte à jeux, peinture au sol, tables à pique-nique ou  pianos communautaires… Chaque année les riverains font preuve d’audace pour transformer leur ruelle terne en un lieu de divertissement coloré. Dans la ruelle La Souche, c’est un espace de jeu dans la cour d’un riverain en bordure de la ruelle qui a été partagé à l’ensemble des enfants. Dans la ruelle du Grand-Peuplier, le bac à sable chez l’un et la piscine chez l’autre ont fait le bonheur de la marmaille.

«La ruelle est devenue une grande cour arrière investie. D’abord par les parents et dans la foulée, par les enfants qui l’aiment tout autant et souhaitent tout autant son embellissement. Allez dans la ruelle c’est non seulement de rencontrer les amis, de jouer avec eux mais c’est également de côtoyer les parents des amis et de partager les intérêts des uns et des autres. Les enfants jardinent et les grands sèment des bonbons!»

– Thierry LeBlond, ruelle du Grand-Peuplier

Crédit photo : Imane Benhacine Photographie

En une période où les lieux publics sont à éviter, les ruelles vertes ont été d’autant plus bénéfiques, car elles ont offert aux enfants des lieux pour jouer en toute sécurité à deux pas de la maison, un élément fort rassurant pour les parents. Ce fut pour eux, une occasion de continuer à tisser les liens sociaux si importants à leur développement, alors que les écoles, les garderies et les camps de jour étaient fermés. Surveillant d’un oeil, les parents y ont eu aussi trouvé leur compte en fraternisant entre eux.

La ruelle comme lien collectif

Chaque fois que nous croisons des riverains qui ont participé au projet Ruelles Vertes, la plus grande réalisation qui leur vient en tête est l’émergence d’un sentiment de collectivité et de bon voisinage que le projet a su faire naître. C’est vrai quasiment à tous coups et probablement leur plus grand avantage en l’année particulière que dessine 2020.

Ce sont d’abord souvent des “inconnus” qui mettent les mains dans la terre ensemble. Puis, ceux-ci deviennent Mathieu, Lili, Marie-Eve, Guy, Simon, Stéphanie ou Sylvie.  Peu importe l’âge et les compétences, les liens entre voisins et le sentiment d’appartenance se tissent autour du projet de ruelle verte. Celui-ci devient alors un prétexte aux activités, aux rires et pourquoi pas, à une petite bière à l’occasion. 

Dans la ruelle HanTée, les riverains ont su s’appuyer sur la petite communauté récemment forgée pour s’offrir de rares divertissements en temps de pandémie. Un groupe de Jazz manouche, dont les membres ont “pignon sur ruelle”, y ont offert un spectacle de cour arrière, avec la ruelle comme parterre et les balcons comme… balcons ! Les familles de cette ruelle et quelques autres ont aussi eu la chance de recevoir le théâtre Les Gros Becs qui a offert des représentations sécuritaires qui pouvaient être observées de la cour et des balcons. Voilà qui aura su soulager quelques carences culturelles issues de la COVID-19.

«Je pense que notre grand succès à nous, et ce qui me rend le plus fier de ce projet-là, c’est que quasiment 100% de mes voisins me saluent quand ils passent devant chez nous […], ils saluent mes enfants et les appellent par leur nom [..]»

– Mathieu Caron,
ruelle HanTée

«Le projet de Ruelles Vertes a sauvé l’été 2020. Ça a été une source de bien-être et de qualité de vie en contexte de pandémie.»

– Carrie,
ruelle du Grand-Peuplier

Nous nous en rendions déjà compte dans les années antérieures que les projets de ruelles vertes enrichissent la collectivité qui y habite, que ces espaces devenaient des interfaces privilégiées entre la résidence et le quartier, des lieux où on se sent bien et dont on est fiers. Ces avantages sont devenus indéniables avec la pandémie. Que ce soit pour y cultiver un jardin, pour une partie de hockey cosom ou un petit théâtre de marionnette intimiste, les ruelles vertes auront eu la cote cet été.

« […] nous avons pu faire de notre ruelle un véritable milieu de vie. Au fil des échanges, des efforts communs et du plaisir partagé, nous avons développé un lien social salutaire en cette période particulière. Au-delà des fleurs, des embellissements apportés et de la sécurité accrue, la plus grande réussite de ce projet demeure une expérience humaine qui continuera à croître au gré des saisons.»

– Geneviève Lebel, ruelle des Mitaines

BONUS : Participez au projet Ruelles vertes

Nous accompagnerons encore les gens de Québec dans le verdissement et l’aménagement de leur ruelle au printemps prochain!

L’appel à candidatures pour l’édition 2021 est toujours en cours jusqu’au 1er décembre 2020. 

Nature Québec soutient aussi LA communauté des ruelles vertes de Québec, qui vise l’échange, le partage et le réseautage entre ruelles! Ça vous intéresse? Que vous soyez riverains d’une ruelle ou non, qu’elle soit déjà verte ou pas, rejoignez le groupe : Les ruelles vertes de Québec.

Portrait de Catherine Deschênes-Quirion

Catherine Deschênes-Quirion

Chargée de projet en verdissement
et mobilisation citoyenne

catherine.deschenes.q@naturequebec.org
418 648-2104 poste 2054

Portrait d'Élisabeth Genest

Elisabeth Genest

Spécialiste en verdissement
et mobilisation citoyenne

elisabeth.genest@naturequebec.org
418 648-2104 poste 2054