Donnez une voix aux caribous…

12 mars 2022

Donnez une voix aux caribous…

…Face aux forestières!

Saviez-vous que le caribou est mal en point au Québec ? En effet, deux des trois écotypes qu’on y retrouve, le caribou forestier et le caribou montagnard de la Gaspésie, connaissent des déclins importants, bien qu’ils soient protégés par les lois canadienne et québécoise. La cause ? L’impact des activités humaines, particulièrement les coupes forestières, qui altèrent leur habitat et les rendent plus vulnérables à la prédation.  

Alors que le Québec a l’obligation légale de protéger l’habitat du caribou, il préfère protéger les possibilités forestières. Pendant ce temps, il met les populations au seuil de l’extinction en enclos.

Le gouvernement a lancé en mars une «Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards». Cette commission étudiera deux scénarios, dont un prévoit littéralement l’abandon et la disparition des populations de caribous de Val-d’Or, de Charlevoix et du Pipmuacan, au bénéfice des forestières!

Bien que Nature Québec juge discutables les motivations de cette commission, nous ne pouvons laisser les lobbys forestiers condamner le caribou sans voix au chapitre.

C’est pourquoi nous y participerons…et nous vous encourageons à faire de même d’ici le 31 mai!

Voici comment. 

Pourquoi est-ce important?

Au Québec, il ne reste plus que quelques populations de caribous au sud du 49e parallèle et elles déclinent toutes dangereusement. Certaines sont au seuil de l’extinction. 

Ainsi, il ne reste plus qu’environ 36 caribous de la Gaspésie, 16 dans Charlevoix et seulement 7 à Val-d’Or. La population du Pipmuacan au Saguenay-Lac-Saint-Jean connaît également un important déclin.

Cette situation critique est le résultat de décennies d’inaction gouvernementale. 

Les mesures à mettre en place sont connues des biologistes et souvent appuyées par les communautés locales. Nous devons profiter de toutes les tribunes à notre disposition pour en faire la promotion.

Populations de caribous en péril

36

Gaspésie

16

Charlevoix

7

Val-d’Or

Populations de caribous au Québec

Source : gouvernement du Québec

Pour participer à la Commission

La Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards est en cours et se poursuivra jusqu’au 31 mai 2022. Vous pouvez y participer en personne ou par écrit en répondant à un questionnaire ou en envoyant un mémoire en ligne.  

Voici les modalités de participation et des arguments que vous pouvez utiliser.

Participation en personne

La Commission tiendra des séances dans des villes de ces régions :

• Gaspésie (12 avril)
• Capitale-Nationale (19 avril)
• Abitibi-Témiscamingue (27 et 28 avril)
• Nord-du-Québec (5 mai)
• Côte-Nord (17 mai)
• Saguenay-Lac-Saint-Jean (11 mai)

Vous pouvez assister à ces séances, pour écouter, émettre votre opinion ou présenter un mémoire (voir les points suivants). L’inscription est fortement recommandée.

Participation par écrit

Que vous puissiez assister en personne aux séances de la Commission ou non, vous pouvez émettre par écrit votre opinion . Pour ce faire, la commission vous offre deux options :

1) Répondre à ce questionnaire en ligne. Vous pouvez vous inspirer des réponses à la section suivante «Les arguments».

2) Déposer un mémoire en format PDF. Téléchargez un modèle de mémoire que vous pouvez modifier à votre guise.

Les arguments

Les deux scénarios étudiés par la Commission se trouvent ici. Cela dit, rien ne vous oblige à en choisir un. Pour Nature Québec, parmi les scénarios proposés, seul le scénario consultatif révisé (premier scénario) est recevable. Bien qu’il soit loin d’être parfait, il intègre tout de même des principes minimaux pour le rétablissement de l’ensemble des populations. Il devra toutefois être bonifié. Par ailleurs, nul besoin d’être un expert-e pour vous prononcer. Vous pouvez très bien exprimer votre demande pour la protection du caribou en vos mots.

Voici tout de même quelques réponses types aux questions du formulaire en ligne. Vous pouvez choisir le ou les arguments qui vous interpellent le plus. Nous vous invitons à vous en inspirer, mais à les personnaliser.

Selon vous, quels sont les éléments prioritaires à considérer dans l’élaboration de la stratégie?

• Une stratégie crédible doit se baser sur la science. En ce sens, il est démontré qu’il y a 60 % de chances d’assurer l’autosuffisance d’une population de caribou lorsque 35 % et moins de son habitat est perturbé. Il est donc primordial de considérer ce seuil comme minimal et de viser mieux, puisqu’il représente déjà un important compromis. La connectivité est un autre élément essentiel à considérer. Elle permet au caribou de se déplacer entre des habitats de bonne qualité et d’assurer un échange génétique entre les populations. Le second scénario proposé par la commission, qui ne prévoit aucune zone de connectivité, devient dès lors tout simplement irrecevable.

• L’élaboration de la stratégie doit s’inscrire dans un esprit de réconciliation avec les peuples autochtones. De ce fait, l’abandon de certaines populations de caribous, espèce clé de l’identité de plusieurs communautés, n’est pas une option. Pour la communauté innue de Pessamit, l’abandon de la population de Pipmuacan constituerait un ethnocide (La Presse +, 1er novembre 2021).

• Sacrifier certaines populations de caribous reviendrait à avouer l’échec du gouvernement à respecter ses engagements et témoignerait de son incapacité à gérer adéquatement ses forêts et à vivre en harmonie avec la biodiversité. Le fait de ne pas respecter ses obligations morales et légales de protection de la biodiversité et des espèces à statut précaire entacherait la réputation du Québec à l’international, ce qui pourrait avoir un impact important sur son accès aux marchés internationaux. Par exemple, cela pourrait engendrer la perte de certifications forestières et, conséquemment, la perte de nombreux clients pour l’exportation de nos produits ligneux.

• Une stratégie ambitieuse serait non seulement bénéfique pour la biodiversité, mais permettrait également de préserver une foule d’autres services écosystémiques rendus par l’habitat des caribous. En restaurant les chemins forestiers abandonnés, on contribue à préserver une autre richesse québécoise, les milieux aquatiques. En protégeant des forêts matures, on augmente notre résilience face aux changements climatiques en plus de réduire nos émissions de gaz à effet de serre. La diversité des services offerts par la forêt boréale devrait être considérée dans la stratégie, et non seulement la valeur du bois qui y est prélevé.

• Bien que nous croyons que les valeurs intrinsèque et culturelle du caribou soient suffisantes en elles-mêmes pour justifier la sauvegarde de cette espèce emblématique du Québec, il est également possible d’y associer des retombées économiques. Par exemple, la création d’aires protégées pour le caribou peut non seulement permettre de préserver des services écologiques d’une valeur souvent bien supérieure à celle du bois qu’on y récolte, mais également de créer des emplois stables et durables. De plus, selon la SÉPAQ, chaque jour-visite dans un parc national génère des dépenses moyennes de 67 $ pour les communautés locales vivant dans les régions limitrophes. Ainsi, le parc national de la Gaspésie, créé avec l’objectif de préserver les caribous montagnards, aurait généré plus de 15 millions de dollars en 2020 pour les collectivités en périphérie considérant les 226 360 jours-visites comptabilisés.

Selon vous, la future stratégie devrait-elle assurer le rétablissement de l’ensemble des populations sans égards aux efforts à consentir ou plutôt se concentrer sur les populations ayant le plus de chances de succès de rétablissement?

• L’abandon de certaines populations de caribous par le Québec causerait d’importants préjudices aux communautés autochtones concernées. Pour la communauté innue de Pessamit, l’abandon de la population de Pipmuacan constituerait une atteinte à ses droits ancestraux et à son identité culturelle. Le conseil de la nation huronne-wendat est lui aussi choqué par la proposition du gouvernement d’abandonner la population de Charlevoix. Quant à elle, la communauté anishnabe de Lac-Simon considère être redevable envers le caribou, grâce à qui elle a pu survivre pendant des millénaires. Il est hors de question dans ce contexte de laisser disparaître la population de Val-d’Or. Le Québec doit prendre ses responsabilités envers ces communautés ; il en a l’obligation morale.

• Malgré la situation précaire de certaines populations de caribous, il ne faut pas oublier que c’est une responsabilité du Québec (bien que partagée avec le fédéral) de protéger les espèces menacées ou vulnérables, et que c’est son inaction au cours des dernières années qui force maintenant la prise de certaines mesures extrêmes. La mise en enclos des caribous et la gestion active des prédateurs sont les conséquences du désengagement du gouvernement, nuisant à l’acceptabilité sociale des mesures de conservation du caribou et générant polarisation et frustration auprès des nombreux utilisateurs qui se partagent les territoires. Il est plus que temps que le Québec s’engage à mettre en place des mesures qui permettront le maintien de l’ensemble des populations de caribous.

• Les efforts de protection et de restauration de l’habitat du caribou, même là où les populations ont de moins grandes probabilités de rétablissement, permettraient d’engendrer des bénéfices beaucoup plus larges que le seul maintien des caribous. Que ce soit la protection des ressources hydriques, la préservation de la faune et la flore associée aux vieilles forêts, et l’augmentation de notre résilience face aux changements climatiques et aux perturbations naturelles, il existe une multitude d’arguments valables qui justifient les efforts de protection de toutes les populations, même celles en situation plus critique. Il est donc essentiel d’assurer le rétablissement de l’ensemble des populations de caribou forestier et montagnard, sans égards aux efforts à consentir.

Selon vous, quel est le juste équilibre à viser entre l’étendue des mesures de protection du caribou à mettre en place et les conséquences socio-économiques qui en découlent?

• Le scénario consultatif révisé (le premier scénario) est un bon point de départ, mais il s’agit déjà d’un énorme compromis entre les besoins du caribou et les revendications de l’industrie forestière. Ce scénario minimal devrait être bonifié par la création d’aires protégées afin de pérenniser la protection de l’habitat du caribou. Les mesures de protection et de restauration doivent être mises en place le plus rapidement possible si l’on souhaite optimiser les probabilités de succès. Aller en deçà de ce scénario ne respecterait pas les engagements du Québec envers la protection du caribou et ne serait qu’une invitation à l’intervention du gouvernement fédéral. Le scénario «sans impact forestier» (deuxième scénario) qui mènerait à la disparition du quart des populations de caribou forestier, est irrecevable et ne devrait pas être étudié par la commission.

• Le Québec a l’obligation légale de protéger les caribous forestiers et montagnards, et donc un juste équilibre ne peut mettre en péril leur survie, ce qui serait le cas avec le scénario «sans impact forestier» (le deuxième scénario). La réputation du Québec à l’international, tout comme celle de l’industrie forestière, est donc en jeu dans ce dossier. Ne pas rencontrer cette obligation pourrait mener à d’autres conséquences, telles que la perte de certifications forestières, lesquelles sont importantes pour développer de nouveaux marchés et répondre à la demande des clients.

• Le juste équilibre est celui qui permet de préserver l’ensemble des valeurs associées au caribou et à son habitat. Il est déplorable de constater l’absence d’un scénario sans aucun impact sur le caribou, et que les seules conséquences socio-économiques considérées soient liées à la perte de possibilité forestière. La perte du caribou engendrerait des impacts majeurs sur la vitalité économique de certaines régions ; ces impacts devraient également être étudiés par la Commission.

Avez-vous des suggestions à formuler à l’intention de la Commission quant aux recommandations qui devraient être retenues?

• Toute recommandation visant à atténuer le scénario consultatif révisé (le premier scénario) ne doit pas être retenue. Il s’agit d’un scénario minimal qui fait déjà l’objet de nombreux et importants compromis entre les besoins du caribou et les revendications de l’industrie forestière.

• Les recommandations qui favorisent l’intégration des savoirs locaux et traditionnels doivent être retenues. La collaboration entre scientifiques et peuples autochtones pour la conservation du caribou est essentielle dans un esprit de réconciliation et de reconnaissance du savoir autochtone. Leurs connaissances intimes du territoire et de l’espèce sont indispensables au succès des démarches de conservation.

• Les recommandations basées sur les résultats probants de la science doivent être retenues, puisqu’elles sont à la base d’une stratégie de protection crédible. Ainsi, les scénarios qui ne permettent pas l’atteinte d’un seuil maximal de 35% de perturbation pour chacune des populations de caribous ou le maintien de zones de connectivité ne doivent pas être retenus.

Vous avez des questions ?

Vous désirez participer à la Commission, mais vous aimeriez d’abord parfaire vos connaissances sur les caribous ? 

Consultez nos foires aux questions sur le caribou forestier et sur le caribou montagnard de la Gaspésie. Elles sont très complètes!

Si vous avez d’autres questions, contactez-nous.